Plaignant
M. Sylvain-Claude Filion
Mis en cause
Le site Internet www.journaldemontreal.com
Résumé de la plainte
M. Sylvain-Claude Filion dépose une plainte le 15 octobre 2017 contre le site Internet www.journaldemontreal.com concernant les textes « Enfin une façon hyper simple d’éviter de faire le ménage » et « 7 sentiers magnifiques à découvrir cet automne », publiés respectivement les 10 et 31 octobre 2017. Le plaignant déplore le manque de distinction entre ces textes publicitaires et le contenu journalistique du site.
CONTEXTE
Les deux textes visés par la plainte relèvent d’un produit publicitaire de type publicité native, qui s’intègre dans les contenus éditoriaux. Le texte « 7 sentiers magnifiques à découvrir cet automne » est publié dans la section « JM Famille », qui regroupe différents types de textes ayant pour sujet la famille. Certains textes de cette section sont présentés comme des produits journalistiques, d’autres comme des textes commandités. Le texte qui fait l’objet de la présente plainte porte la mention « En collaboration avec Les Producteurs de laitiers du Canada ». On y suggère des lieux de randonnées pédestres.
Le deuxième texte, « Enfin une façon hyper simple d’éviter de faire le ménage », traite d’un service d’entretien ménager. Il porte la mention « Présenté par Adèle sur demande ». Il est publié dans la section « Le sac de chips » du site Internet qui se décrit ainsi : « Retrouvez les faits divers et les nouvelles les plus insolites sur le web grâce au Sac de Chips du Journal de Montréal. Buzz, vidéos virales et étrangetés. »
Analyse
Grief 1 : omission de distinguer information et publicité
Principe déontologique applicable
« Les médias d’information établissent une distinction claire entre l’information journalistique et la publicité afin d’éviter toute confusion quant à la nature de l’information transmise au public. » (article 14.2 – distinction claire entre publicité et information – du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
Le comité des plaintes doit déterminer si les mis en cause ont établi une distinction claire entre les textes publicitaires visés par la plainte et le contenu journalistique du site Internet afin d’éviter toute confusion chez le lecteur.
Décision
Le Conseil de presse du Québec retient le grief d’omission de distinguer information et publicité puisqu’il constate un manquement déontologique dans le cas du texte « 7 sentiers magnifiques à découvrir cet automne ». Deux membres défendent la position contraire et un autre s’abstient. Le grief est retenu à la majorité (4/7) pour cet article.
Dans le cas du texte publicitaire « Enfin une façon hyper simple d’éviter de faire le ménage », la majorité des membres (4/7) du comité des plaintes ne constate pas de manquement déontologique. Le grief d’omission de distinguer information et publicité est rejeté pour cet article.
Analyse
1.1 « 7 sentiers magnifiques à découvrir cet automne »
Le Conseil a déjà eu à déterminer si un média avait clairement établi la distinction entre publicité native et contenu journalistique. En 2014, la décision concernant les dossiers D2014-12-061 et D2014-12-070 décrit la publicité native, aussi appelée indigène, comme « une pratique relativement nouvelle et très populaire, qui consiste à intégrer des contenus commandités au coeur des contenus journalistiques ». Dans ce contexte, il est donc essentiel, comme le fait valoir cette décision, qu’« un contenu publicitaire [puisse], à sa face même, être identifié comme tel. Tout doit être en mesure de faire cette constatation au premier coup d’oeil, sans que ne soit requise de sa part une recherche ou une action quelconque ».
Concernant la présente plainte, après analyse de la présentation du texte « 7 sentiers magnifiques à découvrir cet automne », la majorité des membres a jugé qu’elle ne répondait pas aux critères décrits dans la décision antérieure citée précédemment. Tous les lecteurs ne sont pas en mesure d’apprécier à première vue la présentation de ce texte comme étant du contenu publicitaire. Les membres majoritaires considèrent que la présentation du texte ne se distingue pas des articles journalistiques publiés sur ce site Internet. La signature du rédacteur de ce texte est semblable à celle des journalistes, la typographie utilisée est la même que dans le reste du site Internet et les lecteurs ont la possibilité de partager le texte sur les réseaux sociaux, comme c’est le cas des articles journalistiques.
Tout lecteur doit être en mesure de discerner un texte publicitaire d’un article journalistique au premier coup d’oeil, sans que ne soit requise de sa part une recherche ou une action quelconque. Or, lorsqu’on lit le texte, qui consiste en des suggestions de sentiers à découvrir au Québec, on découvre que des produits laitiers sont suggérés au lecteur. On y lit: « Les premières semaines d’automne ont été anormalement chaudes et ensoleillées et les météorologues prévoient même que Dame Nature étendra sa clémence jusqu’en novembre. Afin d’en profiter avec vos proches, faites le plein de protéines et d’énergie avec les produits laitiers et partez à la conquête de ces sentiers. En plus de pouvoir admirer les paysages bucoliques, une longue randonnée est une excellente façon de garder la forme et de bâtir des muscles. N’oubliez pas de vous amener une petite collation protéinée, un peu de fromage, des fruits et des noix qui saura vous soutenir tout au long de votre expédition. »
Les membres majoritaires jugent également que la mention « En collaboration avec Les Producteurs laitiers du Canada », petite, discrète et sans logo, qui figure en haut de la page web, n’est pas suffisante pour permettre au lecteur d’établir qu’il s’agit d’un contenu publicitaire.
Deux membres du comité des plaintes sont dissidents, jugeant que la mention « En collaboration avec Les Producteurs laitiers du Canada » établit suffisamment clairement qu’il s’agit d’une publicité, et qu’à la lecture du texte, le contenu publicitaire apparaît évident.
1.2 « Enfin une façon hyper simple d’éviter de faire le ménage »
Après analyse de la présentation et du contenu du texte « Enfin une façon hyper simple d’éviter de faire le ménage », la majorité des membres considère que le lecteur est en mesure d’identifier qu’il s’agit d’une publicité. Selon la majorité, la mention « Présenté par » accompagnée du logo de l’entreprise Adèle sur demande indique clairement que le lecteur se trouve devant une publicité. De plus, tout au long du texte, le service mis de l’avant est bien identifié d’une part parce qu’on en vante les mérites et d’autre part par les hyperliens, très visibles en typographie rouge et en fonte grasse, renvoyant au site de l’entreprise.
Les trois membres dissidents estiment pour leur part que la distinction entre cette publicité et un article journalistique n’est pas suffisante. Ils observent que le texte emprunte le style éclectique de la section « Le sac de chips », qui propose des nouvelles insolites. La signature du rédacteur publicitaire est affichée de façon semblable à celle d’un journaliste. La typographie est semblable au reste du site Internet et la fonction « partagez » est disponible au-dessus du texte mis en cause, comme on la retrouve dans les articles journalistiques de la même section. Les membres dissidents considèrent que la mention « présenté par », écrite en petits caractères, n’est pas suffisante pour que le lecteur comprenne à première vue qu’il est face à un contenu publicitaire.
Note
Les mis en cause n’ont soumis aucune réplique à la présente plainte. Le Conseil regrette le manque de collaboration du site Internet www.journaldemontreal.com.
Décision
Le Conseil de presse du Québec retient à la majorité (4/7) la plainte de M. Sylvain-Claude Filion et blâme le site Internet www.journaldemontreal.com concernant un grief d’omission de distinguer information et publicité relativement au texte « 7 sentiers magnifiques à découvrir cet automne ».
Le Conseil de presse du Québec rappelle que « lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membres s’engagent à respecter cette obligation et à faire parvenir au Conseil une preuve de cette publication ou diffusion dans les 30 jours de la décision. » (Règlement No 2, article 31.02)
Renée Lamontagne
Présidente du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Ericka Alnéus
M. Luc Grenier
Mme Renée Lamontagne
M. Richard Nardoza
Représentante des journalistes :
Mme Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
M. Jed Kahane
Mme Nicole Tardif