Plaignant
Alexis Lupien-Meilleur
Mis en cause
Denise Bombardier, chroniqueuse
Le quotidien Le Journal de Montréal
Résumé de la plainte
Alexis Lupien-Meilleur dépose une plainte le 19 septembre 2019 contre la chroniqueuse Denise Bombardier et Le Journal de Montréal concernant la chronique « Une face sombre de l’immigration », publiée le 9 septembre 2019. Le plaignant déplore de l’information incomplète.
CONTEXTE
Dans sa chronique, Denise Bombardier rapporte l’histoire d’une adolescente musulmane qui s’est réfugiée chez des voisins pour fuir sa famille qui souhaitait la marier de force. Après avoir relaté l’histoire de la jeune fille et sa demande d’être hébergée en famille d’accueil jusqu’à sa majorité, la chroniqueuse écrit :
« Ce triste événement fait partie de la nouvelle réalité sociale du Québec et met en lumière la nécessité de la loi sur la laïcité. Cette jeune musulmane, courageuse et téméraire, se serait-elle confiée à une enseignante voilée? Aurait-elle eu confiance en une policière voilée? Et aurait-elle accepté de témoigner devant une juge recouverte de ce signe ostentatoire? »
Analyse
PRINCIPE DÉONTOLOGIQUE RELIÉ AU JOURNALISME D’OPINION
Journalisme d’opinion : (1) Le journaliste d’opinion exprime ses points de vue, commentaires, prises de position, critiques ou opinions en disposant, pour ce faire, d’une grande latitude dans le choix du ton et du style qu’il adopte. (2) Le journaliste d’opinion expose les faits les plus pertinents sur lesquels il fonde son opinion, à moins que ceux-ci ne soient déjà connus du public, et doit expliciter le raisonnement qui la justifie. (3) L’information qu’il présente est exacte, rigoureuse dans son raisonnement et complète, tel que défini à l’article 9 du présent Guide. (article 10.2 du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
GRIEF DU PLAIGNANT
Grief 1 : information incomplète
Principe déontologique applicable
Qualités de l’information : « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : e) complétude : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. » (article 9 e) du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
Le Conseil doit déterminer si la chroniqueuse a omis de l’information essentielle en ne précisant pas, comme l’allègue le plaignant, que les voisins de la jeune fille étaient de confession musulmane.
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette le grief d’information incomplète.
Analyse
Le plaignant considère que la chroniqueuse a omis « une information importante » en n’indiquant pas « que la victime s’est d’abord réfugiée chez des voisins de confession musulmane et que ces derniers l’ont protégée de sa famille radicale ». Il appuie son allégation sur l’article « Sauvée d’un mariage forcé à Victoriaville : “Ma famille veut me frapper” », publié par La Presse le même jour que la chronique de Mme Bombardier. Le plaignant pointe un passage rapportant que les événements ont provoqué des « déchirements (…) dans la communauté musulmane du Centre-du-Québec ».
À la lecture de cet article de La Presse, le Conseil constate qu’on n’y précise pas la confession religieuse des voisins en question. On y indique que les voisins et la famille de la jeune fille ont « fui le même pays du Moyen-Orient pour s’établir en tant que réfugiés » et qu’ils parlent arabe. Cependant, ces deux éléments ne permettent pas de conclure qu’ils sont de confession musulmane puisque les Arabes ne sont pas nécessairement des musulmans.
Ainsi, l’article mis en preuve par le plaignant ne démontre pas que les voisins sont musulmans. Le Conseil a rappelé à plusieurs reprises qu’il revient aux plaignants de faire la preuve de ce qu’ils avancent, comme l’indique la décision D2018-04-037. Celle-ci explique que le Conseil ne peut retenir un grief dont il n’a pas de preuves. La décision D2004-07-006 stipule qu’« il revient au plaignant de faire la preuve des accusations qu’il formule ».
Par ailleurs, même si l’article de La Presse avait indiqué clairement que les voisins de la jeune fille étaient musulmans, il a été publié au même moment que la chronique mise en cause. La chroniqueuse n’aurait donc pas pu prendre connaissance de cette information et l’inclure dans son texte.
Note
Le Conseil déplore le refus de collaborer du Journal de Montréal qui n’est pas membre du Conseil de presse, et n’a pas répondu à la présente plainte.
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette la plainte d’Alexis Lupien-Meilleur contre Denise Bombardier et Le Journal de Montréal concernant le grief d’information incomplète.
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Luc Grenier
Linda Taklit, présidente du comité des plaintes
Représentants des journalistes :
Simon Chabot-Blain
Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
Jeanne Dompierre
Éric Trottier