D2023-03-023

Plaignant

Philippe de Grosbois

Mis en cause

Mario Dumont, animateur

Émission « Mario Dumont »

LCN, Groupe TVA

Québecor Média

Date de dépôt de la plainte

Le 25 mars 2023

Date de la décision

Le 22 mars 2024

Résumé de la plainte

Philippe de Grosbois dépose une plainte le 25 mars 2023 au sujet d’une entrevue de l’animateur Mario Dumont avec l’invitée Me Sibel Ataogul durant le segment « Arrestations de masse » de l’émission « Mario Dumont », diffusée le 15 mars 2023 sur les ondes de LCN. Le plaignant déplore de l’information inexacte et un manque d’équité. 

Contexte

Onze ans après la grève étudiante québécoise du « printemps érable » survenue en 2012, dans le cadre de laquelle de nombreux étudiants et citoyens ont manifesté pour s’opposer à l’augmentation projetée des droits de scolarité universitaire imposée par le gouvernement libéral de Jean Charest, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, réitère publiquement ses excuses envers les personnes dont les droits ont été brimés, à l’époque, par les corps policiers. Elle annonce également que le règlement municipal P-6 portant sur les rassemblements publics a été abrogé par son administration.

Pour discuter de ce sujet d’actualité, l’animateur Mario Dumont reçoit à son émission d’affaires publiques quotidienne du 15 mars 2023 l’avocate spécialisée en droits et libertés Me Sibel Ataogul, qui a défendu avec succès devant les tribunaux plusieurs manifestants ayant été arrêtés injustement entre 2012 et 2014 et dont les droits ont été brimés.

Principe déontologique relié au journalisme d’opinion 

Journalisme d’opinion : (1) Le journaliste d’opinion exprime ses points de vue, commentaires, prises de position, critiques ou opinions en disposant, pour ce faire, d’une grande latitude dans le choix du ton et du style qu’il adopte. (2) Le journaliste d’opinion expose les faits les plus pertinents sur lesquels il fonde son opinion, à moins que ceux-ci ne soient déjà connus du public, et doit expliciter le raisonnement qui la justifie. (3) L’information qu’il présente est exacte et complète, tel que défini à l’article 9 du présent Guide. (article 10.2 du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)

Griefs du plaignant

Grief 1 : informations inexactes

Principe déontologique applicable

Qualités de l’information : « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité. » (article 9 a) du Guide)

1.1 Casseurs de vitres

Le Conseil doit déterminer si l’animateur Mario Dumont a transmis de l’information inexacte dans l’extrait souligné du passage retranscrit ci-dessous.

Me Sibel Ataogul : « J’ai moi-même contesté des parties du règlement P-6 qui ont été […] abrogées par Projet Montréal. Mais, en fait, les droits ont pas juste été brimés par un règlement, mais par l’application du règlement qu’a fait la police. C’est-à-dire de faire des arrestations de masse, mais non seulement ça, de détenir des gens pendant des heures dans le froid, dans le chaud, dépendant du temps de l’année; les menotter, les mettre dans des autobus avec des menottes, les amener… Y’a des gens qui ont été détenus, là, toute la journée. Donc, c’est pas juste… » 

Mario Dumont : « Alors que ces gens-là, y’auraient préféré être dans la rue, peut-être, pis casser des vitres, mettons, là. »

Décision

Le Conseil de presse du Québec rejette le grief d’information inexacte sur ce point. 

Analyse

Le plaignant estime que les propos de Mario Dumont retranscrits ci-dessus sont inexacts. Il soutient : « Cette affirmation n’est appuyée sur rien, ce sont des calomnies et des préjugés. Lorsque l’invitée [Me Sibel Ataogul] rétorque que les manifestations pour lesquelles les arrestations ont été contestées étaient des manifestations pacifiques, Mario Dumont l’interrompt et la contredit sur la base de ses seuls stéréotypes, plutôt que sur le matériel sur lequel s’est appuyée la Cour. [M.] Dumont revient à plusieurs reprises sur des personnes ayant cassé des vitrines alors que Me Ataogul a déjà dit qu’elle ne représente pas ces personnes. »

Les mis en cause, Mario Dumont et LCN, n’ont pas répondu à la plainte.

Lors de l’analyse d’un grief d’information inexacte qui vise un journaliste d’opinion, il est important de se questionner sur la nature de l’affirmation qui fait l’objet du grief. S’agit-il réellement d’un fait vérifiable ou avons-nous plutôt affaire à une hypothèse qui relève de l’opinion?

Dans le cas présent, Mario Dumont affirme : « Alors que ces gens-là, y’auraient préféré être dans la rue, peut-être, pis casser des vitres, mettons, là. » Notons, d’une part, qu’il utilise le conditionnel (« auraient préféré ») et, d’autre part, qu’il emploie l’adverbe « peut-être » ainsi que l’expression « mettons, là », qui expriment une possibilité. On ne saurait donc voir dans cette phrase l’énonciation d’un fait qui peut être vérifié, mais bien une hypothèse que Mario Dumont soumet à son invitée, Me Ataogul, et qui constitue une opinion.  

Un cas similaire portant sur la distinction entre un fait et une opinion a été observé dans la décision antérieure D2019-01-005. Dans ce dossier, le Conseil devait déterminer si une chroniqueuse avait commis une inexactitude en écrivant que « le Canada est devenu un paradis pour les communautés ethnoculturelles et racisées ». Même si le plaignant était d’avis que le Canada est loin d’être un « paradis », en raison « d’énormes défis entre autres sur le plan de l’emploi », le Conseil a constaté que « la chroniqueuse présentait un avis différent » et n’y voyait pas d’erreur de fait. Le Conseil a estimé qu’il s’agissait là « du point de vue de l’auteure du texte qui, en tant que chroniqueuse, jouit de la liberté d’opinion et dispose d’une grande latitude dans le choix du ton et du style qu’elle adopte ».  

Dans le cas présent, durant la portion de l’entretien visée par ce grief, M. Dumont et Me Ataogul ne parlent pas des mêmes personnes, ce qui crée de la confusion. Me Ataogul fait référence aux manifestants pacifiques qu’elle a représentés devant les tribunaux et qui ont été détenus injustement par les forces de l’ordre, tandis que M. Dumont parle plutôt des casseurs qui ont causé des dommages matériels et commis des actes de violence. Cela dit, peu importe à quels manifestants Mario Dumont faisait référence en soutenant que ceux-ci « auraient préféré être dans la rue, peut-être, pis casser des vitres », le journaliste d’opinion évoque ici une hypothèse et non un fait. C’est pourquoi le grief d’information inexact est rejeté.

1.2 Ne rien faire

Le Conseil doit déterminer si l’animateur Mario Dumont a transmis de l’information inexacte dans les deux extraits soulignés du passage retranscrit ci-dessous.

Me Sibel Ataogul : « Mais quand on regarde les faits, et qu’on analyse les faits en tant qu’avocate ou en tant que personne impliquée, ce qu’on voit c’est que, en fait, les interventions policières bloquent très souvent la rue pendant des heures et des heures pour des gens… Y’avait même des touristes qui ont été pris dans des souricières, des gens qui avaient rien à voir… Donc, ce genre de méthodes-là, ç’a coûté des millions à la Ville, pas juste en dédommagements, avec des tickets qui sont tombés et tout. Fait que, j’pense qu’il faut adresser toutes les problématiques dont vous parlez, et dont nous on parle. » 

Mario Dumont : « Hmm. Fait qu’en gros, la police laisse aller, là. Tant pis pour le bien public, tant pis pour, on… Parce que là… »

Me Sibel Ataogul : « Non, je pense que… » 

Mario Dumont : « Parce que là, là, non mais, la conséquence de tous les jugements que vous avez gagnés… J’en suis conscient, vous en avez pas perdu. Toutes les lois au Canada, les chartes, le droit d’manifester, y’est défendu de toutes les manières! Vous avez tout gagné, je, j’en conviens, je constate ça, moi aussi! Mais c’que ça nous dit, là, pour les gens… les gens qui manifestent pas, pis les gens qui considèrent que dans une démocratie, c’est le droit de vote qui a primauté, etc., ben, pour tous ces gens-là, tu dis : “OK, on… si… si y’en a qui décident de manifester, on est otage de ça! La police doit rien faire, personne doit rien faire, on laisse aller!” »

Décision

Le Conseil rejette le grief d’information inexacte sur ce point. 

Analyse

Le plaignant est d’avis que les deux extraits retranscrits ci-dessus sont inexacts. Il affirme : « Après les explications de Me Ataogul, [Mario] Dumont résume en négligeant complètement ce qu’elle a dit : “Fait qu’en gros, la police laisse aller, là. Tant pis pour le bien public […] Si y’en a qui décident de manifester, on est otage de ça! La police doit rien faire, personne doit rien faire […]”, alors que Me Ataogul vient de parler du Code criminel qui peut s’appliquer. »

De la même manière qu’au grief précédent, l’animateur Mario Dumont présente ici une hypothèse. En soutenant qu’« en gros, la police laisse aller, là. Tant pis pour le bien public » et que « si y’en a qui décident de manifester, on est otage de ça! La police doit rien faire, personne doit rien faire », il n’évoque pas un fait dont il est possible de vérifier l’exactitude. Il jette plutôt un regard différent sur la situation afin de confronter son invitée et la faire réagir.  

Durant cette partie de l’entretien, M. Dumont incarne le point de vue des citoyens qui seraient en désaccord avec les jugements de la Cour ayant donné raison à Me Ataogul, et qui s’opposent de manière générale aux manifestations. Il examine la situation à travers un prisme complètement différent de celui de son invitée, et présente une interprétation empreinte de sarcasme des conséquences qui pourraient découler des jugements des tribunaux, qui ont tranché de manière unanime en faveur des manifestants défendus par Me Ataogul.

Rappelons que, comme l’avance le principe 10.2 du Guide de déontologie journalistique, le journaliste d’opinion « exprime ses points de vue, commentaires, prises de position, critiques ou opinions en disposant, pour ce faire, d’une grande latitude dans le choix du ton et du style qu’il adopte ».

Puisque nous avons affaire ici à une hypothèse avancée par un journaliste d’opinion et non à un fait qui peut être vérifié, le grief d’information inexacte est rejeté.

Grief 2 : manque d’équité

Principe déontologique applicable

Équité : « Les journalistes et les médias d’information traitent avec équité les personnes et les groupes qui font l’objet de l’information ou avec lesquels ils sont en interaction. » (article 17 du Guide)

2.1 Manifestants aux droits brimés

Le Conseil doit déterminer si l’animateur Mario Dumont a manqué d’équité envers les manifestants dont les droits ont été brimés durant son entretien avec Me Sibel Ataogul.

Décision

Le Conseil rejette le grief de manque d’équité sur ce point.

Analyse 

Le plaignant reproche à Mario Dumont d’avoir manqué d’équité envers les manifestants dont les droits ont été brimés lors de la grève étudiante du « printemps érable » survenue en 2012. Il pointe « l’ensemble de l’entrevue » et cite le passage suivant à titre d’exemple.

Mario Dumont : « J’ai vu des autos de police virées à l’envers, mises en feu. J’ai vu des vitrines cassées soir après soir. Est-ce qu’on sait qui va s’excuser pour ça? Est-ce que les carrés rouges vont s’excuser? Est-ce que quelqu’un va s’excuser pour le vandalisme quotidien des carrés rouges? »

Il indique : « À travers l’ensemble de l’entrevue, on voit que Mario Dumont n’a aucun intérêt pour les manifestants dont les droits ont été brimés (tel que reconnu par la Ville elle-même). Il ne montre aucune intention de reconnaître la réalité de ces personnes (qui sont l’objet de l’entrevue) et préfère parler d’autres personnes pour rendre coupables par association les personnes représentées par Me Ataogul. Toute son attention porte sur un sujet pour lequel l’avocate n’est pas concernée. »

À propos de la citation de Mario Dumont recopiée ci-dessus, le plaignant ajoute : « Ces questions dévient complètement du sujet, à savoir les excuses de la Ville à propos d’arrestations lors de manifestations pacifiques. [M.] Dumont n’est pas équitable ici puisqu’il refuse de reconnaître que les droits des manifestants ont été brimés, il préfère critiquer d’autres manifestants pour d’autres actions ayant eu lieu à d’autres occasions. »

Le principe déontologique de manque d’équité concerne la façon dont les médias traitent ou interagissent avec les gens qui font l’objet de leur couverture journalistique. Lors de l’analyse d’un grief de manque d’équité, il faut évaluer si le journaliste a fait preuve de mauvaise foi envers une personne ou un groupe, s’il n’a pas été juste. Par exemple, s’il a utilisé un procédé déloyal ou malhonnête pour obtenir de l’information.

Le principe d’équité tel qu’énoncé dans le Guide de déontologie journalistique stipule : « Les journalistes et les médias d’information traitent avec équité les personnes et les groupes qui font l’objet de l’information ou avec lesquels ils sont en interaction. » Dans le cas présent, le manque d’équité allégué vise « les manifestants dont les droits ont été brimés ». Il est donc question d’un groupe qui fait l’objet de l’information, et non des personnes avec lesquelles Mario Dumont était directement en interaction.

À l’écoute de l’ensemble du segment en cause, on constate que la perspective des manifestants dont les droits ont été brimés est représentée par Me Ataogul, qui a eu l’occasion de défendre leur point de vue. Il est évident que M. Dumont exprime des opinions et des critiques virulentes à l’endroit des manifestants, mais le fait d’être en désaccord avec la décision des tribunaux qui leur est favorable et d’exprimer une prise de position divergente ne constitue pas un manque d’équité. De la même manière, s’opposer au droit de manifester ne signifie pas que l’on manque d’équité envers les manifestants représentés par Me Ataogul. 

La décision antérieure D2017-11-135 (2) fait état de nuances importantes entre une critique sévère et un manque d’équité, ce qui s’applique également au présent grief. Dans ce dossier, confirmé en appel, le Conseil a jugé qu’une « critique d’un groupe [les féministes abolitionnistes de la CLES] dans le cadre d’un reportage d’opinion ne saurait représenter un manque d’équité, dans la mesure où le journaliste d’opinion peut critiquer, même vertement, les personnes qui font l’objet de son texte ». Le Conseil a noté que « la critique ne constitue pas un manquement professionnel […]. Bien que la critique puisse être perçue comme sévère, la journaliste a le droit d’émettre son opinion et n’a pas manqué d’équité à l’endroit des membres de la CLES. » 

À titre d’exemple a contrario, la décision antérieure D2020-09-120 démontre bien ce que constitue un manque d’équité. Dans ce dossier, un chroniqueur d’opinion avait accordé un traitement très différent à un lecteur qui ne partageait pas son aversion pour le « jargon éducatif », par opposition à d’autres lecteurs qui étaient du même avis que lui. Le chroniqueur avait notamment divulgué le nom complet du lecteur qui était en désaccord avec lui, tandis qu’il ne nommait les autres lecteurs que par leur prénom. De plus, il dénigrait ce lecteur personnellement en racontant qu’il lui avait fait parvenir « une fable plate en tabarslak, mal écrite, pas drôle. Bref, M. Willems écrit comme un pied, il a sûrement d’autres qualités, mais il écrit comme un pied. Mais il se trouvait bien drôle […]. » 

En conclusion, nous ne sommes pas ici devant un cas de manque d’équité au sens du Guide de déontologie journalistique. Bien que l’animateur critique vivement les manifestants, il n’est pas en interaction avec eux, ne les traite pas inéquitablement et donne la parole à leur représentante.

2.2 Me Sibel Ataogul

Le Conseil doit déterminer si l’animateur Mario Dumont a manqué d’équité envers Me Sibel Ataogul en interviewant cette dernière.

Décision

Le Conseil retient le grief de manque d’équité sur ce point, car il juge que Mario Dumont a contrevenu à l’article 17 du Guide.   

Analyse 

Le plaignant reproche à Mario Dumont d’avoir manqué d’équité envers Me Sibel Ataogul. Il soutient : « Vers [02:21], lorsque Me Ataogul explique qu’il y a un système de justice criminelle pour le vandalisme, [Mario] Dumont l’interrompt en faisant preuve de sarcasme : “Ah, pis y’a été sévère avec eux!” et “Y n’a combien qui ont fait d’la prison, des voyous, là?” Lorsque Me Ataogul explique qu’elle ne représente pas ces personnes, [M.] Dumont réagit encore avec un “Ouin” qui sous-entend qu’il considère sa réponse comme de “belles paroles” pas crédibles. Il l’interrompt à nouveau et dit : “Y n’a combien qui ont payé pour leurs actes? Les vitrines cassées, y n’a combien qui les ont remboursées, ou leurs parents?” Me Ataogul répète qu’elle ne représente pas ces personnes et que ce n’est pas ce qu’on lui a demandé d’aborder dans l’entrevue lorsqu’on l’a invitée. »

Le plaignant poursuit : « Vers [03:11], lorsque Me Ataogul explique que des manifestants ont été opprimés par la police, [M.] Dumont l’interrompt à nouveau et y va d’une lancée éditoriale qui n’a plus rien à voir avec l’équité nécessaire à une telle entrevue : “Ont été opprimés par la police? Sérieusement, vous riez de nous, là! Allez parler aux commerçants, pendant des semaines, madame, les gens avaient plus accès au centre-ville. Des commerçants en ont péri. Les manifestants occupaient toute la rue, bloquaient toute la ville, empêchaient les gens de vivre, pis vous dites qu’y ont pas eu l’droit d’manifester? Y’ont fait rien qu’ça, manifester! La ville était une grosse manifestation! […] Y’avait pu de vie dans la ville à part des manifestations! Les commerces du centre-ville crevaient. Vous dites qu’y ont pas eu l’droit d’manifester?!” Son ton de voix est agressif, il crie et est très agité. »

Contrairement au grief précédent, le manque d’équité allégué concerne ici une personne avec laquelle l’animateur Mario Dumont est directement en interaction, dans le cadre d’une entrevue d’une durée de 7 minutes 40 secondes : l’avocate spécialisée en droits et libertés Me Sibel Ataogul.

Durant l’ensemble de l’entretien, on constate qu’un « dialogue de sourds » a lieu entre Mario Dumont et Me Ataogul, car l’animateur et son invitée ne font pas référence au même type de manifestants. Me Ataogul mentionne à plusieurs reprises qu’elle représente des manifestants pacifiques dont les droits ont été brimés, tandis que M. Dumont la questionne maintes fois à propos des manifestants qui ont commis des actes de vandalisme, même s’il sait qu’elle n’est pas la porte-parole des casseurs et qu’elle n’est pas apte à répondre de leurs gestes.

L’avocate explique à plusieurs reprises au cours de l’entrevue qu’elle ne représente pas les gens auxquels Mario Dumont fait référence :  « Écoutez, je ne représente pas les voyous. », « Je ne représente pas ces gens-là. », « Moi, l’entrevue qu’on m’a demandé de faire concerne les violations des droits des milliers de personnes de Montréal, pas quelques personnes qui auraient cassé des vitres. », « Ben, écoutez, je suis pas une représentante de personnes qui auraient causé des dommages. Moi, je représente des gens qui ont manifesté pacifiquement », « ​​Écoutez, moi, les gens que je représente, c’est des gens qui ont manifesté pacifiquement. Donc, si y’a d’autres gens de qui vous voulez des excuses, j’suis sûre que leurs avocats pourraient faire les entrevues. » 

Mario Dumont ne tient cependant pas compte des explications de Me Ataogul et continue de lui poser des questions auxquelles elle n’est pas en mesure de répondre, à propos de manifestants qu’elle ne représente pas : « Est-ce que les carrés rouges vont s’excuser? Est-ce que quelqu’un va s’excuser pour le vandalisme quotidien des carrés rouges? », « Y n’a combien qui ont payé pour leurs actes? Les vitrines cassées, y n’a combien qui les ont remboursées, ou leurs parents? », « Vous allez répondre aux questions! Qui va s’excuser pour les carrés rouges et les dommages qu’ils ont causés? »

Considérant que l’invitée, Me Sibel Ataogul, ne représente pas les manifestants « casseurs » auxquels l’animateur Mario Dumont fait référence tout au long de l’entretien et que ce dernier persiste à la questionner à ce sujet en ignorant les explications de son interlocutrice, le grief de manque d’équité est retenu.

Note

Le Conseil déplore le refus de collaborer de LCN, qui n’est pas membre du Conseil de presse et n’a pas répondu à la présente plainte.

Conclusion

Le Conseil de presse du Québec retient la plainte de Philippe de Grosbois visant une entrevue de l’animateur Mario Dumont avec l’invitée Me Sibel Ataogul durant le segment « Arrestations de masse » de l’émission « Mario Dumont », diffusée le 15 mars 2023 sur les ondes de LCN, concernant le grief de manque d’équité envers Me Ataogul. Il blâme l’animateur Mario Dumont et le réseau LCN.

Par ailleurs, le Conseil rejette les deux griefs d’information inexacte ainsi qu’un second grief de manque d’équité.

Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membres s’engagent à respecter cette obligation et à faire parvenir au Conseil une preuve de cette publication ou diffusion dans les 30 jours de la décision. » (Règlement 2, article 31.02)

La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :

Représentants du public

Renée Lamontagne, présidente du comité des plaintes

Olivier Girardeau

Représentants des journalistes

Rémi Authier

Sylvie Fournier

Représentants des entreprises de presse

Maxime Bertrand

Éric Grenier