D2023-10-074

Plaignant

Jean-François Amyot

Mis en cause

Hugo Joncas, journaliste

Dominick Gravel, photographe

Le quotidien La Presse

Date de dépôt de la plainte

Le 31 octobre 2023

Date de la décision

Le 21 juin 2024

Résumé de la plainte

Jean-François Amyot dépose une plainte le 31 octobre 2023 au sujet de la photographie prise par Dominick Gravel qui accompagne l’article « Réseau de manipulation boursière – Des amendes totalisant 830 000 $ pour du pump and dump », du journaliste Hugo Joncas, publié sur le site Internet de La Presse le 17 octobre 2023. Le plaignant déplore une photographie ne respectant pas la vie privée. 

Contexte

La plainte vise la photo qui illustre l’article « Réseau de manipulation boursière – Des amendes totalisant 830 000 $ pour du pump and dump ». Le plaignant est Jean-François Amyot, l’homme qui apparaît sur cette photo. L’article rapporte que deux hommes d’affaires qui travaillaient avec M. Amyot ont été reconnus coupables « d’avoir “influencé ou tenté d’influencer” la valeur d’un titre, “par des pratiques déloyales, abusives ou frauduleuses” ». L’article rappelle que Jean-François Amyot « a écopé d’une amende record de 11,2 millions et de trois mois de prison à purger de façon discontinue, en 2017 ».

La photo visée par la plainte a été prise en mai 2022, alors que le journaliste Hugo Joncas et le photographe Dominick Gravel se sont rendus au domicile de Jean-François Amyot pour recueillir sa version des faits pour les reportages « Paradis fiscaux – Plus d’argent pour ses sociétés offshore que pour ses amendes » et « Manipulations boursières – Une nouvelle enquête sur un adepte du pump and dump », publiés respectivement les 23 et 24 mai 2022. 

Dans le premier article, on rapporte : « Un virtuose québécois de la manipulation boursière a payé une infime partie des amendes de 11,2 millions dont il a écopé. Depuis 2016, il [Jean-François Amyot] a aussi ouvert trois sociétés extraterritoriales et des comptes de banque aux quatre coins du globe. C’est ce que démontrent les Pandora Papers, la fuite massive de documents sur les paradis fiscaux. » M. Amyot a reconnu détenir des sociétés-écrans, mais il a affirmé à La Presse « qu’elles n’existent plus aujourd’hui et qu’elles sont restées inactives. » 

En plus de l’amende de 11,2 M $ et de la peine de prison imposées en 2017 à Jean-François Amyot par la justice québécoise, l’article mentionne qu’« une juge du Massachusetts l’avait déjà condamné en 2015 à payer 6,9 millions US (9,2 millions CAN à l’époque) en amende pour son stratagème de manipulation boursière sur des actions de pacotille américaines. » 

Cet article explique également le stratagème de pump and dump (pompage et largage) : « En bref, Amyot et ses complices avaient fait circuler des informations fausses ou trompeuses sur des entreprises afin de doper artificiellement la valeur de leurs actions. Ils liquidaient ensuite leurs titres afin d’empocher d’importants profits, avant que les autres investisseurs découvrent la supercherie et perdent leur mise. Pour faire monter le cours de l’action d’une société pharmaceutique par exemple, les suspects prétendaient faussement qu’elle avait développé une technologie avec l’Université du Québec à Montréal, puis reçu une offre d’achat d’un fonds koweïtien. »

Dans l’article « Manipulations boursières – Une nouvelle enquête sur un adepte du pump and dump », publié le lendemain, on indique que « la Gendarmerie royale du Canada, la Sûreté du Québec et l’Autorité des marchés financiers soupçonnent Jean-François Amyot de s’adonner à nouveau aux manipulations boursières. Elles enquêtent sur lui depuis 2017, année où il écopait de son amende de 11,2 millions de dollars pour le même crime. »

On peut y lire :

« Même après cinq ans de travail, les enquêteurs ne sont toutefois pas près d’aboutir, car ils peinent toujours à accéder à une partie de la preuve saisie. Ils ont dû mettre à l’écart 252 courriels, pièces jointes et messages textes découverts à l’époque sans pouvoir les consulter. Les documents proviennent d’un compte de courriel portant le nom de son ancien avocat Bruce Taub.

Au Canada, les communications entre un suspect et son représentant légal sont privilégiées et ne doivent pas être accessibles à la police.

La Presse révélait lundi comment le même avocat, Me Taub, a servi à enregistrer des sociétés aux îles Vierges britanniques et à Hong Kong pour Amyot de 2016 à 2019, selon les Pandora Papers, la fuite massive de documents sur les paradis fiscaux. »

L’article rapporte la version des faits de M. Amyot : 

« Malgré l’enquête sur lui qui dure depuis cinq ans, Jean-François Amyot se défend bien d’avoir récidivé dans la manipulation boursière.

“Leur hypothèse, c’est que ce qui est arrivé avec Inolife, c’est ce que j’ai fait dans le passé, dit-il. Mais ils ne trouveront jamais parce que ce n’est pas ça qui est arrivé du tout.” 

[…]

“Je me suis reconnu coupable en 2017 et je vais devoir payer une dette pour le reste de ma vie, une peine en perpétuité, dit-il au sujet de son amende de 11,2 millions. Une peine que j’accepte aujourd’hui, et j’essaye de rebâtir ma vie professionnelle malgré les enjeux et obstacles.” »

Grief du plaignant

Grief 1 : photographie manquant de respect envers la vie privée

Principes déontologiques applicables

Protection de la vie privée et de la dignité : « (1) Les journalistes et les médias d’information respectent le droit fondamental de toute personne à sa vie privée et à sa dignité. (2) Les journalistes et les médias d’information peuvent privilégier le droit du public à l’information lorsque des éléments de la vie privée ou portant atteinte à la dignité d’une personne sont d’intérêt public. » (article 18 du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)

Illustrations, manchettes, titres et légendes : « Le choix et le traitement des éléments accompagnant ou habillant une information, tels que les photographies, vidéos, illustrations, manchettes, titres et légendes, doivent refléter l’information à laquelle ces éléments se rattachent. » (article 14.3 du Guide)

Le Conseil doit déterminer si la photographie manque de respect au droit à la vie privée du plaignant.

Décision

Le Conseil de presse du Québec rejette le grief de photographie manquant de respect envers la vie privée.

Analyse

Le plaignant déplore la publication d’une photo de lui prise sur sa propriété privée, alors qu’il aurait refusé d’être photographié. 

Le plaignant explique : « En mai 2022, le journaliste Hugo Joncas et un photographe, Dominick Gravel, se sont rendus jusqu’à mon domicile […] [qui] fait partie d’un développement intégré et pour se rendre jusqu’à mon domicile, les gens doivent franchir une clôture qui met en garde les gens qu’ils accèdent à une propriété privée. » Il précise qu’il demeure sur une rue privée et non une rue municipale.  

Selon le plaignant, « le journaliste et le photographe ont décidé d’ignorer ces faits et se sont rendus jusqu’à mon domicile, qui est approximativement à 1,7 km de l’entrée indiquée “privée” […]. Le journaliste m’a demandé la permission de prendre ma photo et j’ai catégoriquement refusé sa demande. Malgré mon refus, le journaliste m’a illégalement enregistré à l’aide d’une caméra cachée [et] le photographe a illégalement pris ma photo à mon insu de l’intérieur de sa voiture stationnée sur ma propriété privée. »

Le représentant de La Presse, Jean-François Demers, réplique qu’« il était hautement d’intérêt public d’accompagner les informations rapportées dans le texte d’une photo du plaignant. En effet, le texte fait état de l’imposition d’amendes totalisant 830 000 $ à MM. Cortellazzi et Savaris, deux manipulateurs boursiers qui travaillaient dans un vaste réseau auquel a également participé activement le plaignant. »

La Presse fait valoir que l’article rapporte une décision judiciaire au sujet des différents membres d’un réseau de manipulateurs boursiers dans laquelle la juge Josée Bélanger indique que le rôle de Jean-François Amyot dans l’organisation était plus important que celui des défendeurs.  

Le représentant de La Presse poursuit : « Étant donné son implication prédominante dans le même réseau de manipulateurs boursiers que MM. Cortellazzi et Savaris, il était tout à fait légitime de diffuser la photo de M. Amyot au soutien du texte rapportant la peine infligée à ceux-ci. Il s’agissait d’un choix éditorial de La Presse. »

« En outre, le texte rappelle plusieurs faits au sujet de M. Amyot lui-même, notamment qu’il a écopé de la plus lourde peine de tout le réseau de manipulateurs boursiers de l’organisation d’Andrea Cortellazzi et qu’il fait l’objet d’une nouvelle enquête pour d’autres possibles manipulations boursières. »

M. Demers souligne que la photo qui accompagne « le texte ne porte d’aucune façon atteinte à la dignité de M. Amyot, puisqu’on le voit simplement assis sur son balcon en discussion avec le journaliste Hugo Joncas, ce dernier étant toutefois hors du cadre de la photo ».

En ce qui concerne l’allégation d’atteinte à la vie privée, M. Demers fait valoir : « En tenant pour avéré que la captation et la diffusion de la photo du plaignant constituent une atteinte à son droit à la vie privée, ce qui n’est pas admis, celle-ci est minime, puisque le plaignant se trouvait sur son balcon à l’extérieur de son domicile, à la vue de quiconque circulait sur le chemin du développement immobilier où se trouve sa résidence. »

« [L]’atteinte à la vie privée du plaignant, s’il en est, est tout à fait justifiée par le droit du public à l’information. En effet, la diffusion de la photo du plaignant en accompagnement du texte permet au public d’identifier et au besoin, de reconnaître M. Amyot qui, rappelons-le, a été condamné à des amendes totalisant 11,2 millions de dollars en lien avec des infractions de manipulation boursière qui ont lésé des investisseurs membres du public. »

M. Demers conclut : « Ainsi, contrairement à ce qu’allègue M. Amyot, son consentement n’était pas requis pour prendre sa photo et la diffuser au soutien du texte. »

En réponse aux arguments de La Presse, le plaignant indique : « Je suis d’avis que La Presse confond la publication d’information privée pour l’intérêt public et la violation et l’intrusion d’un lieu privé afin de prendre une photo comme complément à de l’information potentiellement d’intérêt public. Leur choix éditorial et leur interprétation que ma photo est de l’intérêt public sont très subjectifs. Je vous soumets que le sujet de l’article est l’amende de 830 000 $ qu’ont reçue MM. Cortellazzi et Savaris après une décision de la juge Bélanger le 5 octobre 2023. Les informations contenues à mon sujet, même si erronées, sont peut-être complémentaires à l’information qui pourrait être d’intérêt public, mais une photo prise 17 mois avant l’article ne peut être considérée comme d’intérêt public. Rien de la photo ne contient des éléments d’actualité qui pourraient justifier le raisonnement des journalistes de l’utiliser pour l’intérêt public. »

Avant d’amorcer l’analyse de ce dossier, il importe de rappeler que le grief de manque de respect à la vie privée est ici analysé en fonction des principes de déontologie journalistique et non sous l’angle de la Loi. Même si certains principes de déontologie comme celui du respect de la vie privée peuvent paraître similaires à des critères légaux (le droit à l’image, par exemple), les avis déontologiques du Conseil diffèrent des avis légaux des tribunaux et le Conseil ne prétend pas se substituer à un tribunal. Le Conseil évalue si les journalistes ont respecté les principes déontologiques du métier tels que définis dans le Guide du Conseil et dans ses nombreuses décisions antérieures. En matière de vie privée, il évalue la vie privée des personnes en fonction de l’intérêt public d’une information.

Dans le présent dossier, il s’agit de déterminer si la photo accompagnant l’article de La Presse « Réseau de manipulation boursière – Des amendes totalisant 830 000 $ pour du pump and dump » manque de respect à la vie privée du plaignant. Cette photo, prise légèrement en contre-plongée, montre Jean-François Amyot assis sur une chaise, sur une galerie extérieure, alors qu’il s’adresse à une personne qui se situe à l’extérieur du cadre de la photo. Le plaignant porte un jean et une veste et il est coiffé d’une casquette de sport. Les seuls éléments de la résidence visibles sont le mur extérieur de couleur jaune ainsi qu’un volet blanc et une chaise en bois. De la façon dont la photo est cadrée, on ne voit ni le numéro d’immeuble, ni la maison dans son ensemble. 

Lors de l’analyse d’un grief de manque de respect à la vie privée, il convient de procéder par étape. Tout d’abord, il s’agit d’évaluer si la personne qui serait l’objet d’un manque de respect à sa vie privée est identifiable par le grand public. Dans le cas présent, la réponse est oui puisque le bas de vignette qui accompagne la photo indique : « Les accusés, Michael Raso Cortellazzi et Antonio Savaris, travaillaient avec le manipulateur financier Jean-François Amyot (photo). »

Le plaignant étant identifiable du grand public, il faut par la suite déterminer si la photo révèle des éléments de sa vie privée, alors qu’il est photographié à l’extérieur de sa résidence. La photo publiée par le média permet de voir isolément le visage de Jean-François Amyot et le bas de vignette qui l’accompagne indique son nom et son prénom. On n’aperçoit cependant pas le numéro d’immeuble de sa maison ou le nom de sa rue, ni aucun autre détail de sa vie privée. Cependant, la publication d’une photo d’une personne identifiable par son visage associée à son nom complet, prise sans consentement devant sa résidence privée peut constituer des éléments de sa vie privée.

C’est ensuite la notion d’intérêt public qui permet de déterminer si la publication d’éléments relevant de la vie privée constitue ou non un manquement déontologique. 

L’analyse de l’intérêt public ne se fait pas de la même façon selon qu’il s’agit d’une personnalité publique ou d’un citoyen anonyme. Dans le cas présent, Jean-François Amyot ne peut pas être considéré comme un quidam puisqu’il a fait l’objet de plusieurs articles journalistiques au fil des 13 dernières années en raison des enquêtes et des poursuites auxquelles il a fait face au Canada et aux États-Unis. En 2015, le plaignant a été condamné par une juge du Massachusetts à payer une amende de 6,9 millions de dollars américains concernant un stratagème de manipulation boursière sur des actions de pacotilles américaines. Puis, en 2017, il a été condamné au Québec à une amende record de 11,2 M$ et à trois mois de prison à purger de façon discontinue. Son nom est revenu dans l’actualité en 2022 dans le cadre des enquêtes liées aux Panama Papers, une fuite massive de documents sur les paradis fiscaux, et en raison d’une nouvelle enquête de la Gendarmerie royale du Canada, de la Sûreté du Québec et de l’Autorité des marchés financiers aux sujets de manipulations boursières. L’article visé par la plainte rapporte les amendes imposées à Michael Raso Cortellazzi et Antonio Savaris, qui ont été « reconnus coupables d’avoir “influencé ou tenté d’influencer” la valeur d’un titre “par des pratiques déloyales, abusives ou frauduleuses”. » On y rappelle que les deux hommes « travaillaient avec le manipulateur boursier Jean-François Amyot ».

Les différentes enquêtes et condamnations visant Jean-François Amyot ont fait l’objet d’une attention médiatique importante au cours des dernières années. Elles l’ont placé dans l’œil du public. Ses manœuvres frauduleuses impliquant de petits investisseurs, l’intérêt public justifie de publier une photo de lui. D’autant que cette photo reflète l’information à laquelle elle se rapporte puisque l’article mentionne son implication dans les activités des deux hommes qui sont l’objet de la nouvelle.

La notoriété de la personne à qui on aurait manqué de respect à sa vie privée et le contexte dans lequel on publie sa photo sont à prendre en considération dans l’analyse du grief, comme le souligne la décision D2019-12-161. Dans ce dossier, le Conseil a rejeté le grief d’atteinte à la vie privée et la dignité en rappelant que la personne faisant l’objet de l’article visé par la plainte était une personnalité publique puisqu’elle était conseillère municipale. « Le caractère public d’une personne influence directement la notion d’intérêt public, tout comme le contexte du sujet. En effet, une personne qui accepte de prendre une charge publique, par exemple, une personne en position d’autorité ou d’influence, une vedette,  ou encore une personne qui se retrouve dans l’œil du public par ses actions, parce qu’elle a commis un crime, par exemple, ne peut pas s’attendre au même degré de vie privée qu’un inconnu. L’intérêt du public à connaître certaines informations considérées comme privées dépend du contexte entourant la personne visée, comme le rappellent plusieurs décisions antérieures du Conseil. » 

De la même façon, dans le cas présent, en raison de ses activités illégales rapportées dans les médias par intérêt public, le plaignant ne pouvait s’attendre au même niveau de vie privée qu’une personne qui ne se trouve pas dans l’œil du public. Il est d’intérêt public de montrer son visage et de donner son nom, car cela pourrait notamment permettre de protéger de potentiels investisseurs. De voir son visage permet par ailleurs au public de le distinguer d’un autre homme qui porterait le même nom.

Il est important de rappeler qu’une photo est une source d’information en elle-même. Dans une décision qui ne visait pas un manque de respect à la vie privée, le Conseil a souligné l’importance d’une photo dans un article d’information. Dans ce dossier (D2023-03-019) qui concernait la publication en première page du Journal de Montréal de la photo de Steeve Gagnon se présentant au palais de justice d’Amqui pour y être formellement accusé de conduite dangereuse ayant causé la mort, le Conseil a fait valoir que « la photo visée par la plainte apporte des éléments d’information importants sur la comparution du suspect qui se dirige vers le tribunal pour faire face à la justice. En effet, dans le contexte de reportages d’actualités, les photos apportent une panoplie d’informations additionnelles pour le public. Qui est Steeve Gagnon? Comment est-il arrivé au palais de justice? Dans quel contexte? Quel était son comportement? Alors qu’on cherchait à comprendre le drame et le processus judiciaire qui s’ensuivrait, la photo de l’accusé faisait partie des informations importantes. Dans le cadre de la couverture judiciaire, les médias diffusent régulièrement des images des accusés, qu’il s’agisse de photos trouvées sur les médias sociaux, de photos prises à leur arrivée au palais de justice ou au moment de leur arrestation. Ces photos constituent des éléments d’information pour le public. Elles peuvent permettre d’identifier les accusés et d’éviter qu’ils ne soient confondus avec une autre personne portant le même nom, par exemple. Il arrive aussi qu’elles fournissent des indications sur leur comportement au moment de leur arrestation ou dans les corridors du palais de justice. »

Dans le cas de la photo de Jean-François Amyot, cette image permet d’identifier un homme condamné à d’importantes amendes pour fraude dans un article rapportant les sentences de deux hommes avec qui il travaillait. 

Le fait qu’une photo montre une personne qui se retrouve dans l’actualité devant sa résidence ne constitue pas en soi une atteinte à sa vie privée. Les éléments de la vie privée exposés sont soupesés en fonction de l’intérêt public. 

Dans le dossier D2019-11-156, tout comme dans le cas présent, les photos visées par le grief de manque de respect à la vie privée montraient le plaignant devant sa résidence. Ce plaignant, Charles-Eugène Apestéguy, était le sujet central de l’article mis en cause qui rapportait que l’homme, qui était aumônier à la prison de Rivière-des-Prairies, avait bénéficié d’une exemption de taxes municipales et scolaires de manière indue en déclarant sa maison de McMasterville comme un presbytère. Ce cas avait de particulier qu’on pouvait aussi voir le numéro civique de la demeure et que la légende de la photo indiquait la ville où elle se situait. Il y avait donc encore plus d’éléments visibles au sujet de sa résidence que dans le cas qui nous concerne, bien que le nom de la rue n’y apparaissait pas. Le Conseil a alors déterminé qu’il n’y avait pas d’atteinte à la vie privée du plaignant, faisant valoir que « le fait de montrer cette maison – déclarée comme un presbytère à mauvais escient – était d’intérêt public ». 

Ainsi, même dans le cas de l’aumônier pris en photo devant sa résidence, où il y avait encore plus d’éléments visibles au sujet du lieu de résidence du plaignant, l’intérêt public a primé et le grief a été rejeté. Dans le cas présent, bien que la photo montre Jean-François Amyot sur la galerie de sa résidence, il ne saurait y avoir une atteinte à la vie privée du plaignant, qui revenait dans l’actualité en raison de ses liens avec les personnes faisant l’objet de cette nouvelle d’intérêt public.

Conclusion

Le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de Jean-François Amyot visant la photographie prise par Dominick Gravel qui accompagne l’article « Réseau de manipulation boursière – Des amendes totalisant 830 000 $ pour du pump and dump », du journaliste Hugo Joncas, publié sur le site Internet La Presse le 17 octobre 2023, concernant le grief de photographie manquant de respect envers la vie privée.

La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :

Représentants du public

Renée Lamontagne, présidente du comité des plaintes

Charles-Éric Lavery

Représentants des journalistes

Rémi Authier

Paule Vermot-Desroches

Représentants des entreprises de presse

Stéphan Frappier

Sylvain Poisson