Montréal, mercredi 25 janvier 2017 — Le tribunal d’honneur du Conseil de presse du Québec a rendu et publié quinze (15) nouvelles décisions reliées à des plaintes qu’on lui avait soumises. Huit (8) d’entre elles ont été retenues, les sept (7) autres ayant été rejetées.
Entretenir des préjugés, c’est… contraire à la déontologie journalistique
D2016-02-093 : Mme Audrey Laliberté St-Pierre, M. Édouard Guay, Mme Lysane Fréchette, Mme Cassie Nantais, Mme Marie Denis, Mme Alexandrine Dupuis et 45 plaignants en appuis c. M. Richard Martineau, chroniqueur, M. Dany Doucet, rédacteur en chef, Le Journal de Montréal, M. Sébastien Ménard, rédacteur en chef, Le Journal de Québec
Au total, 51 personnes ont déposé une plainte contre Richard Martineau, le Journal de Montréal et le Journal de Québec pour un article intitulé « Les filles, c’est nono (projet de monologue) ». Aux yeux des plaignants, la chronique incitait à la violence et contenait des propos méprisants entretenant des préjugés envers les femmes et les musulmans.
Le comité des plaintes, par une courte majorité de trois membres sur cinq, leur a donné partiellement raison, jugeant que le chroniqueur avait effectivement encouragé des préjugés dégradants lorsqu’il écrit qu’« aucun homme n’accepterait » le traitement que subissent certaines femmes ou encore lorsqu’il dépeint sans nuances aucunes le port du voile islamique par les femmes musulmanes.
Les deux membres dissidents, pour leur part, ont estimé que les passages dénoncés par les plaignants, bien que durs, devaient être jugés pour ce qu’ils étaient vraiment : de la satire, un genre qui mise précisément sur l’exagération des traits dénoncés.
Au final, la plainte ainsi été retenue et les mis en cause ont en conséquence été blâmés.
Non, tous les terroristes ne sont pas musulmans
D2015-12-076 : Mme Josianne Grenier c. M. Dominic Maurais, animateur, M. Philippe Lefebvre, directeur général et la station CHOI 98,1 FM Radio X
À la majorité, le comité des plaintes a retenu une plainte déposée contre Dominic Maurais, animateur à la station de radio CHOI 98,1 FM Radio X, visant des propos que la plaignante jugeait racistes. Plus précisément, elle lui reprochait d’avoir affirmé « que si tous les musulmans ne sont pas terroristes, à l’heure actuelle tous les terroristes sont musulmans. »
Bien que ce soit plutôt son invité, Jacques Brassard, qui les ait tenus, en répondant par l’affirmative à ce dernier, qui concluait en lui demandant « Est-ce que c’est vrai, ça? », le comité a jugé que l’animateur les avait à tout le moins entériner.
Et en l’espèce, le Conseil a également jugé qu’une telle affirmation, dont la fausseté se vérifie facilement, était de nature à entretenir des préjugés fondés sur un motif discriminatoire, en l’occurrence la croyance religieuse.
La plainte a donc été retenue et l’animateur, de même que la station CHOI Radio X, blâmés.
Un cahier spécial à saveur éminemment publicitaire
D2016-02-102 : M. Alain Legros c. MM. Martin Leclerc, Benoît Bilodeau, Christian Asselin, et Claude Desjardins et Mmes Reine Côté et Julie Godin, journalistes, M. Christian Asselin, directeur du contenu rédactionnel et l’hebdomadaire La Voix des Mille-Îles
Le Conseil s’est rendu aux arguments d’un plaignant qui estimait qu’un cahier spécial publié dans l’hebdomadaire La Voix des Mille-Îles était de nature publicitaire et qu’on omettait d’y distinguer la publicité et l’information.
Intitulé « Nous, les Blainvillois », le cahier en question s’ouvrait avec deux mots : un premier, signé par le maire de Blainville, et un deuxième, signé cette fois par une conseillère publicitaire de l’hebdomadaire, qui y écrivait notamment avoir elle-même « préparé ce cahier ».
Le comité des plaintes a retenu les deux griefs – avoir fait de la publicité déguisée et avoir omis de distinguer publicité et information. D’abord parce qu’après analyse, il est apparu que le cahier en question faisait l’apologie de la municipalité et de son administration, sans aucun sens critique; ensuite parce que la « Voix des Mille-Îles n’a pas pris les moyens raisonnables pour distinguer clairement la publicité et l’information journalistique, puisqu’il est manifestement impossible de reconnaître, au premier coup d’oeil, son caractère promotionnel ».
En rafale
D2015-10-057 : Identité protégée
Le Conseil a retenu la plainte de M. Jean-François Bohémier, qui reprochait au journaliste Louis-Denis Ebacher, du quotidien Le Droit, d’avoir identifié un psychologue, témoin-expert dans un procès, alors que son identité faisait l’objet d’une ordonnance de non-publication.
Tout en prenant soin de préciser qu’il est n’est pas de son ressort de déterminer si les mis en cause avaient violé l’ordonnance, puisque cette question appartient aux tribunaux, le Conseil note tout de même que les journalistes doivent faire preuve de prudence en cette matière, et dans le cas présent, considérant que la cause impliquait un mineur, le journaliste se devait de prendre tous les moyens pour protéger l’identité de ce dernier.
Considérant la célérité avec laquelle les mis en cause ont corrigé leur erreur, le Conseil n’a cependant imposé aucune sanction (absolution), malgré la faute.
D2016-01-083 : Une autre erreur dans l’identification d’armes à feu
Pour une énième fois, le Conseil a retenu une plainte dénonçant le fait qu’un reportage portant sur le thème du registre des armes d’épaule soit illustré par des armes prohibées ou à autorisation restreinte, qui ne sont donc pas visées par les politiques dont traite le reportage.
Cette fois-ci, la présentation fautive s’est produite lors d’un reportage présenté à TVA, le 25 janvier 2016, traitant de discussions ayant eu cours lors du caucus de la Coalition Avenir Québec à propos de la création d’un registre québécois d’armes à feu. Le Groupe TVA a en conséquence été blâmé.
2016-01-085 : Quiproquo funéraire
La plainte déposée par M. Marc Légaré, président du groupe détenant un salon funéraire, reprochait à un reportage d’Yves Poirier, diffusé d’abord sur les ondes de TVA, puis sur le site web journaldemontreal.com, d’avoir publié des informations inexactes, un manque d’équilibre, une information incomplète et un manque de respect envers des personnes vivant un drame humain. Le reportage en question rapportait les appréhensions d’une famille, qui doutait que les cendres qu’on leur avait remises étaient bien celles de leur père.
Le Conseil a ainsi jugé que le titre était trop affirmatif, considérant que l’affaire méritait d’être à tout le moins d’être nuancée, et que la version des faits du plaignant n’avait pas été convenablement rapportée. Par contre, il a rejeté le grief voulait que le journaliste, en cherchant à obtenir les réactions d’une autre famille impliquée dans l’affaire, leur avait manqué de respect alors qu’ils vivaient un drame humain.
2016-04-128 : Le ballon de la discorde
Un ballon placé afin de simuler temporairement la hauteur d’une tour de télécommunication que comptait ériger Vidéotron dans le village d’Ayer’s Cliff était-il visible, ou pas, depuis les artères du village? C’est à cette question que cherchait à répondre un article intitulé « Unseen red ballon », publié dans le Stanstead Journal.
Or, en affirmant que ce ballon n’était visible que d’un seul endroit dans le village, le Conseil a estimé que le mis en cause avait publié une information inexacte. Une carte réalisée par Vidéotron, qui n’avait dans les circonstances aucun intérêt à exagérer la visibilité de la tour projetée, suggérait qu’une tour de 10 mètres plus courte pouvait au contraire être vue de plusieurs endroits dans le village – plusieurs endroits que le journaliste disait pourtant, dans son texte, avoir visités.
Décisions de la commission d’appel
La commission d’appel du Conseil de presse a rendu et publié cinq (5) nouvelles décisions reliées à des appels qu’on lui avait soumis. Une (1) décision a été annulée par la commission, les quatre (4) autres étant maintenues. Seule la décision annulée est ici résumée.
Dans cette affaire, les appelants, soit le journal Sada AlMasrek (Écho du Levant) et son rédacteur en chef, estimaient que la décision de première instance devait être purement et simplement annulée, alléguant que « les règles d’équité procédurales n’ont pas été respectées pour les raisons suivantes : 1) La plainte a été adressée à une personne qui n’avait aucun lien avec le journal; 2) La décision a été prise sans que le journal ait le droit le plus fondamental dans un état de droit, soit le droit à un procès juste et équitable. »
Considérant que la partie mise en cause n’avait pu présenter de réplique aux reproches du plaignant, la commission a conclu, à l’unanimité, que la décision de première instance devait être annulée et que le dossier devait recommencer le processus de traitement d’une plainte.
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SOURCE :
Julien Acosta, directeur des communications
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Tél. : (514) 529-2818
RENSEIGNEMENTS :
Guy Amyot, secrétaire général
Conseil de presse du Québec
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