Le Conseil de presse du Québec a publié huit nouvelles décisions relatives à des plaintes qu’on lui avait soumises. Il a retenu quatre plaintes en tout ou en partie et en a rejeté quatre.
D2020-05-079 : Louis-Martin Carrière, Sylvain Rondeau, Zachariel C. LeBlanc, Olivier Lacelle, Frédéric Côté, Paul Bénéteau, Sophie Desroches, Francis Garand et 3 plaignants en appui c. Elizabeth Zogalis, journaliste, CJAD 800 AM et Bell Média
Les plaignants ont déposé des plaintes les 31 mai, 1er et 11 juin 2020 au sujet d’un message publié sur le réseau Twitter par la journaliste Elizabeth Zogalis le 31 mai dans lequel elle affirmait que brandir le drapeau des patriotes était « l’équivalent québécois » de brandir le drapeau confédéré aux États-Unis. Le tweet s’intègrait à la couverture de la journaliste d’une manifestation dénonçant la brutalité policière et le profilage racial. Le Conseil retient le grief d’information inexacte et l’un des sous-griefs de manque de rigueur de raisonnement, mais rejette les griefs de partialité et de discrimination ainsi que le sous-grief de manque de rigueur de raisonnement. Il prononce toutefois l’absolution en raison du retrait rapide du tweet en cause et des excuses présentées par la journaliste dès le lendemain, ce qui constitue une réparation pleine et entière de la faute.
D2020-08-114 : Maxime Drapeau c. Emilie Nicolas, chroniqueuse, et Le Devoir
Maxime Drapeau dépose une plainte, le 25 août 2020, au sujet d’une chronique d’Emilie Nicolas intitulée « Briser le tabou, repenser la police », publiée dans Le Devoir, le 4 juin 2020. Le plaignant reproche à la chroniqueuse de tenter d’attribuer la responsabilité de blessures et de décès à des policiers dans le passage suivant: « 126 personnes ont subi des blessures assez graves aux mains de la police québécoise pour qu’un processus d’enquête soit déclenché, dont 71 personnes qui en sont mortes ». Considérant que des policiers n’étaient pas nécessairement responsables des morts et des blessures survenues durant les interventions policières comme les dossiers du BEI le confirment, cette phrase est inexacte. Le Conseil retient donc le grief d’information inexacte.
Finalement, le Conseil rejette en majorité le grief de manque de rigueur de raisonnement, mais retient le grief d’absence de correctif. En effet, en raison de l’information inexacte et du fait que le plaignant l’avait soulignée au média, Le Devoir aurait dû corriger l’inexactitude.
D2020-07-102 : L’organisme Debout pour la dignité (Wilner Cayo, président) c. Christian Rioux et Le Devoir
L’organisme Debout pour la dignité, par l’entremise de son président Wilner Cayo, dépose une plainte le 23 juillet 2020 au sujet de la chronique « Se rat kay manje kay » du journaliste Christian Rioux publiée dans Le Devoir, le 17 juillet 2020 au moment où le débat sur le racisme systémique et le mouvement Black Lives Matter sont à l’avant-plan de l’actualité au Québec.
Le Conseil a rejeté les griefs d’informations inexactes, relevant plutôt des divergences d’opinions entre la position défendue par le chroniqueur et celle du plaignant. Le Conseil a également rejeté le grief de manque de rigueur de raisonnement. Même si l’opinion de l’auteur a déplu à plusieurs, cela ne signifie pas pour autant que le chroniqueur a manqué au principe de rigueur de raisonnement.
D2020-07-098 : Vincent Bourassa-Bédard c. Le Devoir
Vincent Bourassa-Bédard dépose une plainte le 14 juillet 2020 au sujet d’une contribution du public publiée par Le Devoir, le 23 juin 2020. Il s’agit d’une lettre d’opinion intitulée « Que cache la cabale contre J. K. Rowling? » et signée par Nassira Belloula, une écrivaine et journaliste algéro-canadienne. La lettre publiée dans la section « Libre opinion » revient sur une controverse née à la suite de propos publiés sur le réseau Twitter par l’écrivaine J. K. Rowling. Celle-ci se moquait de l’emploi de l’expression « personnes qui ont des menstruations » et se positionnait sur le concept de sexe biologique.
Le Conseil devait déterminer si le passage « Et alors, les règles ne sont-elles pas un élément lié à la biologie des femmes? » ainsi que les termes « hommes transformés en femmes », « vraies femmes » et « changement de sexe » étaient discriminatoires, entretenaient des préjugés et attisaient la haine envers les personnes trans.
Bien que sensible aux arguments du plaignant et comprenant que ces termes aient pu le choquer, le Conseil rejette en majorité les quatre griefs de discrimination. Les propos ont été utilisés pour illustrer le point de vue de l’auteure sur l’identification des femmes par rapport aux attributs biologiques qu’elles ont à la naissance. Les termes utilisés par Nassira Belloula sont au cœur même de son argumentaire et relèvent de son interprétation, permise par la liberté d’expression, et ne sont pas, en soi, discriminatoires.
D2020-07-094 : Vincent Hébert c. Marie-Claude Lortie, chroniqueuse, et La Presse
Dans sa chronique « Ça va faire », publiée le 10 juillet 2020 dans La Presse, Marie-Claude Lortie critique l’intention du gouvernement du Québec de demander aux propriétaires de bars de tenir des registres de clients qui fréquentent leur établissement afin de faciliter l’identification des contacts par la Santé publique en cas de contamination à la COVID-19. Le plaignant, M. Vincent Hébert, lui reprochait des manques de rigueur de raisonnement.
Un manque de rigueur de raisonnement se manifeste par un amalgame de faits ou une conclusion fallacieuse, notamment. Or, dans ce dossier, bien que le plaignant ne soit pas d’accord avec la perspective de la chroniqueuse, celle-ci ne fait pas de lien abusif. Elle expose plutôt les faits sur lesquels elle base son opinion en plus de se servir de la grande latitude accordée aux journalistes d’opinion. Le Conseil rejette donc le grief de manque de rigueur de raisonnement.
D2020-09-124 : Éloïse Gaudreau c. Arnaud Koenig-Soutière, journaliste, et TVA Nouvelles
Le Conseil de presse du Québec retient la plainte d’Éloïse Gaudreau contre l’article « Deux écoles primaires de Québec en “situation d’éclosion” » de TVA Nouvelles concernant le grief d’information inexacte. Après avoir communiqué avec les autorités sanitaires de la région, les 180 élèves de l’école primaire Dominique-Savio ne devaient pas tous se faire tester comme il était indiqué dans l’article. Le journaliste Arnaud Koenig-Soutière est exonéré dans ce dossier, car même si son nom chapeaute l’article, ce n’est pas lui qui l’a écrit, comme l’a démontré le syndicat de la rédaction du Journal de Québec.
D2020-06-085 : Eric Thomas c. Russ Bynum et Brynn Anderson, journalistes de l’Associated Press, La Presse canadienne et La Presse
Eric Thomas dépose une plainte le 15 juin 2020 contre un article intitulé « Nouvelles vidéos de l’arrestation mortelle à Atlanta » publié le 14 juin 2020 sur le site web du quotidien La Presse. L’article en cause était, à l’origine, une dépêche écrite en anglais par deux journalistes de l’Associated Press et qui a été traduite par La Presse canadienne. Le plaignant conteste l’emploi du terme « meurtre » comme traduction de « killing ». Après avoir étudié plusieurs définitions du mot meurtre, tant dans le langage courant que juridique, le Conseil retient le grief d’information inexacte. En effet, le terme « meurtre » suppose la notion de tuer volontairement ce qui ne peut être imputé au policier au moment où l’article a été rédigé. Le Conseil rejette cependant les griefs de partialité et de sensationnalisme.
D2020-11-155 : Éric W. Girard c. La Presse canadienne et le journal Les Affaires
Le Conseil rejette les griefs d’information inexacte et de partialité dans la plainte qu’Éric W. Girard a déposée contre l’article « Legault présente le Plan vert, et vante GNL-Québec » publié le 16 novembre 2020 sur le site web lesaffaires.com. Le plaignant contestait le choix du nombre de 7,8 millions de tonnes de CO2 par an que le projet GNL-Québec pourrait produire et que le journaliste laissait clairement apparaître son point de vue en affirmant que GNL-Québec est l’un des projets les plus polluants de la province. À la lumière des informations contenues dans un mémoire déposé au BAPE et soutenu par 160 scientifiques, le Conseil estime que les affirmations contenues dans l’article ne sont ni inexactes ni partiales.
À propos
Le Conseil de presse du Québec est un organisme privé, à but non lucratif, qui œuvre depuis près de 50 ans à la protection de la liberté de la presse et à la défense du droit du public à une information de qualité. Son action s’étend à tous les médias d’information distribués ou diffusés au Québec, qu’ils soient membres ou non du Conseil, qu’ils appartiennent à la presse écrite ou électronique. Le Conseil reçoit les plaintes du public et donne son avis relativement à la déontologie journalistique à travers ses décisions. Mécanisme d’autorégulation de la presse, le Conseil ne peut être assimilé à un tribunal civil, il ne possède aucun pouvoir judiciaire, réglementaire, législatif ou coercitif; il n’impose aucune autre sanction que morale.
Le Conseil de presse remercie Cision d’avoir rendu possible l’envoi de ce communiqué.
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RENSEIGNEMENTS :
Manon Desrosiers
Conseil de presse du Québec
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