Lettre à Monsieur Herbert Marx, Ministre de la Justice, Gouvernement du Québec, au sujet de la protection des sources journalistiques

Le 4 août 1987.

Monsieur le Ministre,

Le Conseil de presse du Québec est intervenu à plusieurs reprises pour dénoncer les saisies de matériel journalistique par divers corps policiers et l’utilisation qui pouvait en être faite devant les tribunaux.

Encore aujourd’hui, un média de Montréal a été l’objet d’une saisie de matériel journalistique. En effet, la police de la CUM a confisqué une vidéocassette tournée par la télévision Quatre Saisons concernant une manifestation à la résidence d’un présumé marchand d’armes qui aurait servi d’intermédiaire, selon les manifestants, dans la vente américaine d’armes aux Contras du Nicaragua.

Le Conseil s’inquiète sérieusement du rythme de plus en plus fréquent de ces saisies par les autorités policières et judiciaires. Il y a certainement matière à s’interroger sur le danger que de tels comportements deviennent pratique courante.

Le recours presque immédiat au matériel journalistique, en vue d’élaborer ou de compléter des dossier d’enquête susceptibles d’être déposés en preuve devant les tribunaux, porte gravement atteinte à la liberté de la presse et au droit du public à l’information.

En plus de porter préjudice à la crédibilité de la profession journalistique, la presse peut être privée de sources d’information qui, devenues méfiantes par ces pratiques, s’abstiendraient de lui communiquer des renseignements. De plus, les journalistes pourraient s’interdire de couvrir certains événements d’intérêt public craignant que leur travail ne serve à incriminer les personnes qui y sont impliquées.

Le Conseil de presse exhorte instamment le Gouvernement à agir et à accélérer ses travaux concernant la modification de la Loi sur la presse à ce sujet.
Il est impératif et essentiel que des mesures législatives soient adoptées afin de garantir la protection des informations et des journalistes. Ces mesures sont nécessaires, dans une société démocratique, pour que soit respectée la liberté de la presse d’informer adéquatement le public.

Nous vous invitons donc à faire diligence et vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments les meilleurs.

Au nom des membres du Conseil de presse du Québec,

L’Adjointe au secrétaire général,

Sylvie Trottier

C.C. : MM Daniel Jacoby, sous-ministre de la Justice et sous-procureur général
Jean Pelletier, président, Fédération Professionnelle des journalistes du Québec
Jean Rivard, directeur de l’information, Télévision Quatre Saisons

SOURCE :    Sylvie Trottier, adjointe au secrétaire générale