Québec, le 19 avril 1978. Déjà, en décembre dernier, le Conseil de presse du Québec lançait un cri d’alarme devant l’ampleur des conflits qui perturbaient quelques-uns des plus importants organes d’information au Québec. Le Conseil de presse du Québec en dénonçant alors le grave préjudice ainsi causé au public, lançait un appel urgent au sens de la responsabilité sociale et professionnelle des partenaires en cause, afin qu’elles trouvent les moyens propres à rétablir dans les plus brefs délais un service public essentiel dont la disparition temporaire compromet la qualité de la vie démocratique.
Loin de s’améliorer, cette situation déjà fort précaire n’a fait, depuis ce temps, que s’aggraver! Non seulement subsistent les situations qui paralysaient déjà à l’époque trois des plus importants quotidiens du Québec, mais sont venues s’ajouter d’autres situations tout autant préjudiciables à l’information adéquate du public.
En effet, Québec est toujours privé, et ce depuis le 30 août dernier, de son quotidien Le SoleiI. À Montréal, La Presse et le Montréal-Matin n’ont pas repris leur parution depuis le 6 octobre 1977. Les conflits dans la presse parlée persistent toujours dans les stations de radio du réseau Radio-Mutuel : à Montréal, CJMS et CKMF; à Québec, CJRP; à Sherbrooke, CJRS; à Trois-Rivières, CJTR, sont paralysés par des grèves qui s’éternisent depuis le 26 janvier 1977.
Le 20 mars 1978, le réseau de Radio-Québec, qui est propriété publique, suspendait ses activités, privant ainsi près de 75 % de la population québécoise d’information au niveau des affaires publiques et d’un contenu éducatif et culturel auquel elle a droit.
Le 14 avril, une catégorie d’employés de Radio-Canada répétait l’expérience du 7 décembre 1977 et se déclarait en journée d’études pour vingt-quatre heures frustrant ainsi la population de ses émissions habituelles d’information, tant à la télévision qu’à la radio.
Cet état de la situation ne tient pas compte des conflits qui se perpétuent au niveau des sociétés de télédistribution.
Ainsi, plus d’un million cinq cent mille lecteurs sont privés de leurs sources d’information et de la diversité des points de vue qui leur permettent d’être adéquatement informés. Les conflits dans la presse parlée affectent, pour leur part, une partie importante de la population québécoise que les plus récentes cotes d’écoute permettent d’évaluer à plus de quatre millions d’auditeurs et de téléspectateurs.
Devant les proportions de véritable crise que revêt déjà la situation actuelle de l’information au Québec et face aux conséquences dramatiques qu’elle pourrait avoir si elle devait s’étendre encore, le Conseil de presse du Québec ne peut que répéter avec plus de vigueur son cri d’alarme, conscient que ses effets, surtout dans la conjoncture actuelle, menacent l’exercice même du processus démocratique de notre société.
Au moment même, en effet, où l’annonce d’élections fédérales est imminente, alors qu’une partie de la population était appelée à élire le chef d’un parti d’opposition et que d’autres questions cruciales d’intérêt public se débattent dans tous les domaines qui concernent au plus haut point le public et conditionnent son mode d’existence et son fonctionnement, la société québécoise est privée d’une partie importante des moyens nécessaires pour alimenter sa réflexion et essentiels à la qualité de sa vie démocratique.
Le Conseil considère que la population du Québec qui est la première victime de cette situation ne saurait la tolérer plus longtemps par son silence.
Le Conseil invite donc instamment le public à l’appuyer dans son appel aux parties en cause et à se saisir lui-même du problème en faisant savoir par tous les moyens dont il dispose et, notamment, par l’intermédiaire des groupes de pression et des corps constitués, qu’il n’accepte pas de voir ainsi brimé son droit à l’information plus longtemps!
Le Conseil de presse est un organisme tripartite voué à la protection et à la sauvegarde du droit du public à l’information. Il est composé de six journalistes désignés par la Fédération professionnelle des Journalistes du Québec, de six propriétaires ou administrateurs d’entreprises de presse désignés par l’Association des Quotidiens du Québec, l’Association des Hebdos Régionaux, la Société Radio-Canda, l’Association canadienne des Radio-Télédiffuseurs de Langue française et l’Office de radio et Télédiffusion du Québec et de sept membres du public.
Le Conseil de presse du Québec à son siège social à Québec, au 550, rue Saint-Louis, G1R 3Z6, téléphone 692-3008 – 692-3009