
L’interprétation des sondages, un art à manier prudemment
Pas moins de quatre plaintes visaient, à différents titres, la publication de sondages d’opinion sur le conflit étudiant dans les pages des quotidiens du groupe Gesca (La Presse, Le Soleil et Le Droit), ainsi que sur leurs sites Web. Plusieurs griefs ont ainsi été formulés par les différents plaignants : interprétation erronée des résultats, titres trompeurs et absence d’indications quant à la méthodologie utilisée ou remise en question de sa valeur scientifique.
La première concernait essentiellement les titres coiffant des articles parus dans Le Droit, La Presse et LaPresse.ca et relatant un sondage d’opinion sur l’appui populaire vis-à-vis de l’idée d’adopter une loi spéciale qui aurait mis fin au conflit étudiant. Or, la loi n’ayant pas encore été déposée au moment de mener le sondage, mais l’ayant été au moment d’en publier les résultats, les plaignants ont estimé que les titres étaient trompeurs. De fait, le Conseil de presse (CPQ) a jugé que Le Droit et LaPresse.ca avaient induit leurs lecteurs en erreur en titrant : « Les Québécois appuient la loi spéciale », puisque les répondants pouvaient ne pas en connaître les modalités au moment de se prononcer. Pour les mêmes raisons, le Conseil a jugé qu’il était trompeur d’insinuer dans un titre que les Québécois étaient pour « la ligne dure ».
La seconde plainte reprochait quant à elle au journal La Presse d’avoir accordé une importance démesurée à un sondage, au détriment d’un autre, dont les résultats différaient sensiblement : le premier tendant à démontrer un fort appui populaire envers la position gouvernementale, tandis que le second laissait croire l’inverse. Le CPQ a estimé que la décision de couvrir cet événement relevait de la liberté rédactionnelle reconnue aux médias, et qu’il appartenait en conséquence à La Presse d’établir l’importance accordée à la publication de chacun de ces sondages. La plainte a donc été rejetée.
Finalement, la dernière décision, qui portait sur deux plaintes étudiées conjointement et qui visaient autant Le Soleil que La Presse et le portail web LaPresse.ca, les plaignants reprochaient à ces médias d’avoir omis de publier les indications habituelles relatives à la méthodologie. Le Conseil leur a donné raison sur ce point.
À noter que deux des trois plaintes dénonçaient l’utilisation d’une méthodologie de sondage non probabiliste, un grief sur lequel le comité des plaintes a estimé qu’il ne pouvait se prononcer, n’ayant pas la compétence nécessaire pour en déterminer sa valeur scientifique. La question a été déférée au conseil d’administration du CPQ, qui a récemment mis sur pied un comité, composé à la fois de membres du Conseil et d’experts en matière de sondages. Ce comité a pour mandat d’émettre une série de recommandations concernant l’utilisation par les médias des sondages d’opinion.