D2008-09-012 Isabelle Chiasson, directrice générale, les hebdomadaires Le Journal de Sept-Îles et Nord-Est c. Nicolas Asselin, coéditeur et l’hebdomadaire Journal Le Nord-Côtier
Un cumul de fonctions incompatibles
Mme Chiasson portait plainte contre Nicolas Asselin, éditeur de l’hebdomadaire Journal Le Nord-Côtier, pour être l’auteur de certains articles en même temps qu’il exerce des fonctions de prospection publicitaire pour ce même média.
M. Asselin répliquait que, depuis le mois de mai 2008, il exerce exclusivement les fonctions de conseiller publicitaire. Il reconnait avoir été l’auteur d’articles dans les éditions que soumettait la plaignante au Conseil, uniquement parce que son équipe de journalistes n’était pas disponible. Il ajoutait que, pendant cette période, il ne s’est consacré qu’à cette fonction journalistique. Or, les entreprises de presse doivent veiller elles-mêmes à ce que, par leurs affectations, leurs journalistes ne se retrouvent pas en situation de conflit d’intérêts ni d’apparence de conflit d’intérêts. En regard de ce principe, le Conseil estime que le mis-en-cause, parce qu’il est d’abord officiellement en charge de la publicité pour le Journal Le Nord-Côtier, ne pouvait pas occuper une fonction journalistique, même si le personnel venait à manquer dans son média, sans compromettre son intégrité de journaliste. L’analyse a aussi permis de révéler que M. Asselin est l’auteur d’un éditorial dans chacune des deux éditions du Journal Le Nord-Côtier qui ont été soumises au Conseil. L’activité éditoriale est également une fonction de type journalistique et, par conséquent, le mis-en-cause ne pouvait pas non plus exercer celle-ci parallèlement à ses fonctions de conseiller publicitaire. Le grief fut retenu.
Dans un second temps, la plaignante reprochait à M. Asselin d’avoir tenu, dans son commentaire éditorial daté du 21 août 2008, des propos discriminatoires à l’endroit des hebdomadaires qu’elle dirige ainsi que d’avoir dénigré le travail de journalistes qui œuvrent pour d’autres médias, dans le cadre d’un éditorial publié le 11 septembre 2008. Après analyse, le Conseil a conclu que ces deux éditoriaux respectent bien les balises que pose la déontologie journalistique et qu’ils ne font pas montre de propos discriminatoires ni qu’ils ne dénigrent le travail de certains journalistes. Ce grief a été rejeté.
Le Conseil a blâmé M. Nicolas Asselin pour avoir exercé, pour le Journal Le Nord-Côtier, deux activités incompatibles que sont le journalisme et la promotion d’un média et de s’être placé en situation de conflit d’intérêts.
D2008-09-009 Youcef Bendada c. Lamine Foura, journaliste, l’émission « Montréal Labass » et la radio CINQ FM Radio Centre-Ville
Les journalistes et les médias sont responsables de tous les propos tenus en ondes
M. Bendada portait plainte contre le journaliste Lamine Foura et la direction de la radio CINQ FM Radio Centre-Ville. Il reproche au journaliste d’avoir laissé proférer des propos injurieux et faux à son endroit lors d’une tribune téléphonique de l’émission « Montréal Labass », le 26 juillet 2008, de ne pas être intervenu et d’être en conflit d’intérêts. Il accusait également la direction de ne pas lui avoir accordé un droit de réplique satisfaisant.
Le plaignant accusait le mis-en-cause d’avoir laissé proférer des propos faux et incomplets sur les ondes. Après examen et écoute de l’émission controversée, le Conseil n’a pas relevé de propos de nature injurieuse. Relativement à la fausseté de certains d’entre eux, le plaignant n’a pas fait la preuve de cette accusation. Ce grief a été rejeté.
Le plaignant accusait ensuite le journaliste de ne pas intervenir à la suite des propos des auditeurs et ce, au nom de leur liberté d’expression. Sur ce point, le Conseil a rappelé la responsabilité des journalistes et de leur direction de tout ce qu’ils diffusent sur leurs ondes, y compris les tribunes téléphoniques. La non-intervention du journaliste peut mettre en cause le droit du public à une information de qualité. Les tribunes téléphoniques ou « lignes ouvertes » sont soumises aux mêmes exigences de rigueur, d’authenticité, d’impartialité et de qualité que tout autre type de traitement de l’information. Le rôle de ceux qui les animent requiert une discipline et un discernement d’autant plus grands que les sujets abordés, en raison des intérêts et des passions qu’ils soulèvent, suscitent la controverse. Après examen, le Conseil a estimé que le journaliste a commis un manquement en laissant libre cours aux propos d’un auditeur sans intervenir. Il était de son devoir de remettre en contexte les questions et opinions soulevées, afin d’éclairer tous les auditeurs et ainsi favoriser la qualité de l’information. Le grief a été retenu.
Le plaignant accusait aussi le mis-en-cause de conflit d’intérêts. Il évoquait le fait qu’il était candidat aux élections législatives algériennes de mai 2007, qu’il serait toujours militant et qu’il aurait laissé l’auditeur Rachid Della exprimer ses opinions parce qu’il les acquiescerait. En matière de conflit d’intérêts, le guide de déontologie du Conseil stipule qu’afin de préserver leur crédibilité professionnelle, les journalistes sont tenus à un devoir de réserve quant à leur implication personnelle dans diverses sphères d’activités sociales, politiques ou autres qui pourrait interférer avec leurs obligations de neutralité et d’indépendance. Après analyse, le Conseil a remarqué que les implications politiques passées et actuelles du mis-en-cause s’avèrent compromettantes pour la crédibilité de l’information, particulièrement lorsque des questions politiques émergent durant ses émissions. Le grief a été retenu.
Enfin, le plaignant regrettait que la direction de la radio ne lui ait pas accordé de droit de réplique. En effet, plusieurs mois après l’émission en cause et après le dépôt de la plainte devant le Conseil, les mis-en-cause acceptaient d’accorder au plaignant un droit de réplique. Puisque ce délai n’est pas raisonnable, le Conseil a retenu ce grief.
Le Conseil a blâmé M. Lamine Foura et la direction de CINQ FM, Radio Centre-Ville, pour absence d’animation lors des interventions d’un auditeur durant l’émission « Montréal Labass », conflit d’intérêts et droit de réplique insatisfaisant.
D2008-07-006 Syndicat canadien de l’énergie et du papier (SCEP), section locale 175, Jacques Vanier, président c. Richard Desmarais, journaliste et animateur, l’émission « L’Avocat du diable » et le réseau TQS
Le journalisme d’opinion requiert aussi une information juste et mise en contexte
Le SCEP, représenté par son président, M. Vanier, portait plainte contre le journaliste Richard Desmarais, concernant les propos qu’il a tenus lors de l’émission « L’Avocat du diable », le 30 avril 2008, sur la chaîne de TQS. Il reproche au journaliste d’avoir prononcé des propos infondés et inexacts et regrette que la direction n’ait pas fait de rectification.
Le Conseil a observé, en premier lieu, que le mis-en-cause n’a pas exposé les faits relatifs au conflit de travail avant d’émettre son opinion. Or, les chroniqueurs doivent rappeler les faits relatifs aux événements, situations et questions qu’ils décident de traiter avant de présenter leurs points de vue, critiques et lectures personnelles de l’actualité, afin que le public puisse se former une opinion en toute connaissance de cause quant aux sujets sur lesquels ils se prononcent. Ainsi, le grief relatif au manque de rigueur du mis-en-cause, par absence d’un exposé des faits au début de la chronique, fut retenu.
Ensuite, le plaignant reprochait au mis-en-cause d’avoir tenu des propos inexacts, relativement à sa responsabilité dans la décision de Petro-Canada de déclencher un lock-out. Le Conseil rappelle que la chronique, le billet et la critique sont des genres journalistiques qui doivent respecter les exigences d’exactitude, de précision et d’intégrité, tout en autorisant une plus grande liberté d’expression à leur auteur. Après analyse, le Conseil a observé que le mis-en-cause a exprimé le fait que la libération syndicale du président M. Vanier était le seul litige dans ce conflit de travail. Il a donné son explication quant aux raisons du déclenchement du lock-out. La question de la libération syndicale de M. Vanier représente effectivement un des éléments litigieux dans ce conflit de travail, mais pas le seul. Le grief a été retenu.
Le plaignant dénonçait ensuite le manque de rigueur du mis-en-cause qui avançait des propos sans citer aucune source. En effet, pour défendre son point de vue, il avance : « Je le tiens de source sûre ». Cette affirmation porte à confusion pour l’auditeur. Le Conseil estime que le mis-en-cause se devait de clarifier ses propos concernant la présence d’une « source sûre ». S’il ne pouvait l’identifier distinctement, il se devait d’en expliciter les raisons. Le grief a été retenu.
Puis, le plaignant reprochait à la direction de ne pas avoir diffusé de mise au point relativement aux faits. Compte tenu du premier grief, le mis-en-cause se devait de corriger le manquement identifié. Le grief a été retenu.
Enfin, le Conseil regrette la non-participation des mis-en-cause qui ont refusé de répondre devant le tribunal d’honneur de la plainte les concernant, ce qui va à l’encontre de la responsabilité qu’ont les médias de répondre publiquement de leurs actions. Le Conseil insiste sur l’importance pour tous les médias de participer aux mécanismes d’autorégulation qui contribuent à la qualité de l’information et à la protection de la liberté de presse. Cette collaboration constitue un moyen privilégié pour eux de répondre publiquement de leur responsabilité d’informer adéquatement les citoyens. Le Conseil retient le grief pour manque de collaboration du mis-en-cause.
Le Conseil a blâmé le journaliste Richard Desmarais ainsi que la direction du réseau de télévision TQS pour manque de rigueur, information inexacte, source non identifiée, absence de mise au point et absence de collaboration.
D2008-02-055 Marie-Claude Montpetit c. le réseau CTV
Un manque de collaboration déplorable
Mme Montpetit portait plainte contre le réseau CTV pour n’avoir pas accordé un suivi diligent et rigoureux au processus judiciaire dans le cadre d’affaires juridiques la concernant.
La plaignante déplorait ainsi que le réseau CTV ne se soit pas conformé à l’obligation qui, selon elle, lui incombait de publier une nouvelle concernant son acquittement, survenu en février 2008. Or, il est un principe que la presse doit assurer un suivi rigoureux et diligent de l’information et accorder autant d’importance à l’acquittement d’un prévenu qu’à son inculpation ou à sa mise en accusation. Après analyse, le Conseil a constaté que la cause à laquelle faisait référence Mme Montpetit a été jugée devant la Cour criminelle et pénale du Québec et que le verdict date du 11 février 2008. Le réseau CTV avait donc l’obligation de diffuser une information concernant l’acquittement de Mme Montpetit s’il avait, par le passé, diffusé de l’information relative à sa mise en accusation. Or, la plaignante n’a pas présenté la preuve d’une telle diffusion et, de son côté, le télédiffuseur a refusé de fournir cette information, expliquant que cette demande ne respectait pas le délai de prescription en vigueur au Conseil de presse. Le règlement du Conseil se lit comme suit : « À moins de circonstance exceptionnelle que le plaignant doit établir, une plainte doit être soumise dans un délai de six mois suivant la publication ou la diffusion de l’objet visé par la plainte. » (Article 3.10, Règlement No 3). Pour le Conseil, il est clair que la plainte de Mme Montpetit ne porte pas sur le possible reportage diffusé par CTV lors de son accusation, mais bien sur l’absence de suivi lors de son acquittement. Le délai de prescription est donc respecté. Il est également clair, pour le Conseil, que le réseau CTV avait l’obligation de l’informer de l’existence d’un tel reportage, non pas pour en faire l’examen, mais afin de déterminer l’obligation qu’avait le réseau de présenter un suivi au procès de Mme Montpetit. Son refus de fournir cette information est basé sur une interprétation abusive de l’article 3.10 du Règlement No. 3 du Conseil de presse et constitue, par conséquent, un manque de coopération.
Le Conseil a blâmé le réseau CTV pour manque de collaboration.
D2008-09-013 Yves Drapeau, cinéaste c. Serge Gagnon, directeur de la publication et le mensuel L’Horizon
Un conflit d’intérêts qui remet en question la neutralité du média
Le plaignant reprochait au mensuel L’Horizon de ne pas avoir traité de son projet cinématographique, dont il fut question dans une conférence de presse. Il contestait ce choix rédactionnel qui s’expliquerait par le conflit d’intérêts dans lequel se trouverait le directeur de la publication, puisqu’il occuperait également des fonctions de graphiste à la Ville de Trois-Pistoles. Or, cette municipalité était critiquée lors de la conférence de presse du plaignant.
Tout d’abord, le plaignant reprochait au journal de ne pas avoir traité de son projet cinématographique, présenté lors d’une conférence de presse couverte par une des journalistes du mensuel. Il invoque l’intérêt public de son projet et sa portée culturelle pour toute la région. Or, il est un principe déontologique reconnu, qu’en matière de choix rédactionnel, le choix des faits et des événements rapportés, de même que celui des questions d’intérêt public traitées, relèvent de la discrétion des directions des salles de nouvelles des organes de presse et des journalistes. Ce grief a été rejeté.
Le plaignant reprochait ensuite au directeur de la publication d’être en conflit d’intérêts, ce qui expliquerait le choix rédactionnel le discriminant, puisque le directeur de la publication serait parallèlement graphiste pour la Ville de Trois-Pistoles, dont le plaignant critiquait le comportement lors de la conférence de presse. Les entreprises de presse et les journalistes doivent éviter les conflits d’intérêts ainsi que toute situation qui risque de les faire paraître en conflit d’intérêts, ou donner l’impression qu’ils ont partie liée avec des intérêts particuliers ou quelque pouvoir politique ou autre. Le Conseil estime que le mis-en-cause est en conflit d’intérêts en exerçant une fonction de responsable dans une entreprise de presse et de contractuel pour une municipalité. Le mensuel est régulièrement appelé à couvrir des sujets concernant la municipalité. Cette situation met en cause la crédibilité du journal. Le grief a été retenu.
Le Conseil a retenu la plainte de M. Yves Drapeau, contre le mensuel L’Horizon et son directeur de la publication, M. Serge Gagnon, pour conflit d’intérêts.
D2008-06-088 Jean-Marc Fortier c. Anne-Marie Doyon, Louis Poulin et Patrice Moore, animateurs et journalistes et la station 103,3 COOL FM (CHRB-FM, Radio-Beauce Inc.)
Des propos abusifs en regard du rôle d’animateur et de journaliste
M. Fortier portait plainte contre trois animateurs de la station radiophonique de Ville- St-Georges, 103,3 COOL FM. Le plaignant considère inacceptables et non professionnels certains propos que les animateurs ont tenus lors de deux émissions diffusées en mai 2008.
Le plaignant déplore que, lors de l’émission « Deux gars le midi », diffusée le 20 ou le 21 mai 2008 sur les ondes du 103,3 COOL FM, les animateurs et journalistes Louis Poulin et Patrice Moore se soient servis de fuites de la Commission Bouchard-Taylor afin de provoquer les auditeurs. Le jour de l’incident, l’émission avait pour thème la Commission, dont le rapport avait été déposé, mais n’avait pas encore été rendu public. Les animateurs auraient communiqué des informations inexactes, incomplètes et non appuyées sur des sources fiables. La jurisprudence du Conseil indique qu’il appartient d’abord au plaignant de faire la preuve des accusations qu’il formule avant d’obtenir une condamnation des mis-en-cause. Or, l’analyse faite par le Conseil indique qu’au-delà de formuler ces accusations, le plaignant ne démontre pas en quoi l’information livrée par les animateurs est mal fondée, fausse ou incomplète. Le grief fut rejeté.
Le second grief concernait un incident survenu le 22 mai 2008, lors de l’émission du matin animée par Patrice Moore, en collaboration avec Anne-Marie Doyon et Louis Poulin. Le sujet du jour concernait le cas d’une policière qui s’était fait arrêter en état d’ébriété et l’animateur M. Moore « se questionnait à savoir si dans la confrérie policière ils devaient se couvrir ou dénoncer la faute lorsqu’ils étaient mis au fait de cette faute ». Le plaignant a téléphoné et demandé aux trois journalistes : quelle serait leur conduite s’il arrivait qu’un de leurs collègues déroge à l’éthique journalistique. Il a ajouté qu’il « fermait la ligne afin de bien entendre la réponse à la radio ». Selon le plaignant, la réponse des animateurs a été très irrespectueuse à son endroit et manquait de maturité journalistique : Mme Doyon, en laissant entendre qu’il « n’était pas assez brave pour rester en ondes », et M. Moore en lui répondant de ne plus rappeler. Or, le guide de déontologie du Conseil de presse indique que les animateurs doivent respecter les opinions de leurs interlocuteurs et éviter à leur endroit tous propos, attitudes ou tons offensants. Le public est en droit de s’attendre à ce qu’ils n’abusent pas de leur fonction ni de leur latitude pour imposer leurs points de vue personnels et écarter ceux qui n’y correspondent pas. Sans recourir à l’autocensure, les animateurs doivent éviter de se laisser guider par leurs préjugés, leurs intérêts personnels ou leurs inimitiés. Après examen des documents des parties et des bandes audio fournies par les mis-en-cause, le Conseil constate que ceux-ci se sont laissés guider par leurs inimitiés et ont abusé de leurs fonctions, en employant un ton irrespectueux à l’égard du plaignant. Le grief a été retenu.
Le plaignant reprochait aussi aux animateurs, de part leurs réactions lors de l’émission, d’avoir manqué de respect à sa réputation. Le Conseil considère toutefois que les propos tenus par les animateurs, bien qu’impolis, n’étaient pas de nature à manquer de respect à la réputation du plaignant. Le grief fut rejeté.
Le Conseil a retenu la plainte contre les animateurs et journalistes Anne-Marie Doyon, Patrice Moore et Louis Poulin et la station radiophonique 103,3 COOL FM, CHRB-FM, Radio-Beauce Inc, pour propos, attitudes et tons irrespectueux.
D2008-08-008 Richard Emery, inspecteur, officier responsable du bureau des communications, division C de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) c. Denis Arcand, journaliste et le quotidien La Presse
Une activité journalistique qui n’entrave pas le cours de la justice
M. Emery, au nom de la GRC, portait plainte contre Denis Arcand, pour avoir attenté au bon déroulement d’une opération policière ainsi qu’à la sécurité des policiers et ce, dans le but de produire un article à caractère sensationnaliste intitulé « Ouvre ou on défonce ta porte drett’là! », publié le 19 juin 2008 dans le quotidien La Presse.
La GRC reprochait, dans un premier temps, à M. Arcand de s’être rendu chez un suspect à la veille de son arrestation afin de vérifier l’état d’exécution du mandat d’arrestation; information que la GRC a refusé de lui confirmer et ce, principalement afin d’assurer la sécurité de ses policiers. Elle reprochait, par ailleurs, à M. Arcand de ne pas s’être tenu à l’écart lorsque les policiers ont, le lendemain, procédé à l’arrestation, ce qui aurait perturbé le bon déroulement de l’intervention. La déontologie du Conseil stipule que la presse, tout en assurant le droit à l’information sur les aspects d’intérêt public, doit éviter d’entraver le cours de la justice. Après étude du dossier, le Conseil a cependant conclu qu’en se rendant chez le suspect dans le but de savoir s’il avait déjà reçu la visite de policiers, le journaliste n’a pas entravé le cours de la justice. Cette conclusion ne vaut néanmoins que dans l’hypothèse où M. Arcand n’a pas fait part au suspect de la possibilité qu’il soit arrêté le lendemain. Le plaignant n’ayant jamais présenté la preuve du contraire. Le grief fut rejeté.
En ce qui a trait au reproche concernant le bon déroulement de l’opération policière, le mis-en-cause apporte une version contraire à celle du plaignant en affirmant s’être soumis aux directives des policiers. La GRC mentionne l’existence de la photographie illustrant l’article qui, selon lui, démontrerait que le journaliste a perturbé le bon déroulement des opérations policières. Le Conseil constate que le cliché, illustrant le suspect en état d’arrestation et maintenu par un policier, laisse entrevoir en arrière-plan M. Arcand. Cette photographie n’apporte toutefois aucune information concernant la possibilité que le mis-en-cause ait perturbé le bon déroulement de l’opération policière. Le grief fut rejeté.
Enfin, la GRC se plaignait du sensationnalisme de l’article publié par M. Arcand à la suite de l’arrestation dont il a été témoin. Elle soutenait que la démarche du mis-en-cause, en ayant des conséquences sur le déroulement de l’arrestation du suspect, lui aurait permis d’écrire un article nettement plus sensationnaliste. Le mis-en-cause rétorquait que la présence de n’importe quel observateur peut avoir des effets sur le déroulement d’un événement. Le guide des Droits et responsabilités de la presse du Conseil indique que les médias et les professionnels de l’information doivent traiter l’information recueillie sans déformer la réalité. Le recours au sensationnalisme risque de donner lieu à une exagération et une interprétation abusive des faits et d’induire le public en erreur quant à la valeur et à la portée réelles des informations qui lui sont transmises. Après analyse, le Conseil a constaté que le journaliste a rapporté la nouvelle dans le respect des règles que lui imposait la déontologie. Le grief a été rejeté.
Le Conseil a rejeté la plainte de la Gendarmerie royale du Canada à l’égard du journaliste, M. Denis Arcand et du quotidien La Presse.
D2008-07-004 Mehrnoushe Solouki c. Laura-Julie Perreault, journaliste et le quotidien La Presse
À défaut d’interdiction, toute confidence faite à un journaliste risque d’être rendue publique
Mme Solouki portait plainte contre la journaliste Laura-Julie Perreault et le quotidien La Presse, au sujet d’un article portant sur son séjour en Iran. Elle reproche à la journaliste d’avoir déformé ses propos, tenus lors d’une entrevue téléphonique qui relevait, selon elle, de la sphère privée. Elle l’accuse aussi d’avoir utilisé son témoignage pour défendre des intérêts autres et d’avoir atteint à sa réputation. Elle regrette que le quotidien ne lui ait pas transmis la cassette de ladite interview et ne lui ait pas accordé un droit de réplique.
En premier lieu, la plaignante reprochait à la journaliste d’avoir déformé ses propos, tenus lors d’une interview téléphonique le 21 janvier 2008. Au regard des documents fournis, notamment la communication par courriels entre la plaignante et la mise-en-cause et les articles en cause, le Conseil estime que la journaliste n’a pas commis de faute déontologique. Elle a rapporté les propos et les a mis en contexte. Le grief a été rejeté.
La plaignante accusait aussi la mise-en-cause d’avoir publié des informations contenues dans des courriels échangés en juin 2007 qui étaient de l’ordre privé. Après analyse, le Conseil estime que la journaliste n’a pas commis de faute déontologique en rapportant ces propos tenus par la plaignante, dans la mesure où ils sont d’intérêt public, qu’ils permettent de comprendre la situation vécue par cette dernière et que la plaignante n’a jamais interdit à la journaliste de les publier.
Ensuite, la plaignante accusait la mise-en-cause d’être en conflit d’intérêts. Elle affirmait que la journaliste entretiendrait des relations d’amitié avec des groupes d’opposantes iraniennes qui biaiseraient son traitement de l’information. Elle estime que la journaliste a utilisé son témoignage pour défendre l’intérêt de ce groupe. Après analyse, le Conseil a observé que ces accusations ne sont aucunement démontrées et le grief fut rejeté.
Puis, la plaignante reprochait au journal d’avoir refusé de publier sa lettre de réplique. Or, puisqu’il n’y a pas eu faute de la part de la journaliste et que les éditeurs ne sont pas tenus de publier systématiquement les lettres de répliques, le Conseil a rejeté le grief.
La plaignante reprochait aux mis-en-cause de ne pas lui avoir transmis l’enregistrement de l’interview téléphonique avec la journaliste, afin qu’elle puisse en vérifier le contenu. Le Conseil estime que le matériel journalistique demeure, en tout temps, la propriété des médias. Les sources d’information ne détiennent aucun droit d’accès à ce matériel, même si elles y ont contribué. Le grief fut rejeté.
Enfin, la plaignante reprochait à l’article de la journaliste d’avoir manqué de respect à sa réputation et d’avoir nui à sa situation familiale et professionnelle. Le Conseil n’ignore pas que la publication d’un article peut avoir des conséquences parfois néfastes. Or, il est de la responsabilité des journalistes de faire des choix rédactionnels en fonction du degré d’intérêt public. Dans ce cas, le Conseil estime que la journaliste n’a pas commis de faute au regard de l’éthique journalistique et n’a pas, dans ces propos, manqué de respect à la réputation de la plaignante. Aprè