Plaignant
M. Hugo Plouffe
M. Mario Junior Benoit
M. Pierre-Yves Turcotte
Mis en cause
Mme Claudia Berthiaume, journaliste
Les sites Internet journaldemontreal.com et journaldequebec.com
Résumé de la plainte
MM. Hugo Plouffe, Mario Junior Benoit et Pierre-Yves Turcotte déposent une plainte le 25 mai 2017 contre la journaliste Mme Claudia Berthiaume et les sites Internet journaldemontreal.com et journaldequebec.com concernant l’article « D’autres fusils d’assaut en vente », publié le 25 mai 2017. Les plaignants déplorent des informations inexactes et de l’information incomplète.
Les sites Internet journaldemontreal.com et journaldequebec.com n’ont pas souhaité répondre à la plainte. De son côté, la journaliste Claudia Berthiaume a répondu en son nom personnel.
Dans l’article visé, la journaliste rapporte que « trois nouveaux fusils d’assaut seront bientôt en vente au Canada ».
Analyse
Grief 1 : informations inexactes
Les mis en cause considèrent que l’article comporte deux inexactitudes.
1.1 Fusils d’assaut
Les trois plaignants estiment qu’il est faux d’écrire que « trois nouveaux fusils d’assaut seront bientôt en vente au Canada ». Ils reprochent à la journaliste de faire de la « fausse représentation » en employant le terme « fusils d’assaut », alors que ces armes seraient prohibées depuis plusieurs décennies. Un des plaignants fait valoir que « par définition un fusil d’assaut doit avoir un sélecteur de tir afin de tirer en rafales ou en mode automatique et ils sont donc prohibés par la loi canadienne ». Ils dénoncent l’utilisation du terme « fusils d’assaut » dans le texte et dans le titre de l’article, qui est « D’autres fusils d’assaut en vente ».
La journaliste mise en cause répond que le terme « “armes d’assaut” n’est pas une catégorie à proprement parler ici. Par contre, chez nos voisins du Sud, les armes d’assaut sont définies par l’ATF [Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives] comme des armes pouvant accommoder des configurations militaires, telles que des crosses pliables, des télescopes, des baïonnettes, une poignée de pistolet, un lance-grenade, une lentille nocturne, etc. Elles ne sont pas classées selon la façon dont elles tirent (semi-automatique ou automatique). »
En matière d’exactitude, le Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec prévoit, à l’article 9, alinéa a), que « les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité ».
Dans le dossier D2013-09-031, « le Conseil constate que le terme “étang” est abondamment utilisé par les intervenants dans ce dossier, ce qui justifie que le journaliste croyait que cela correspondait au type de milieu humide présent avant le remblaiement. Quant au rapport soumis au Conseil par le plaignant, datant de 2006, il fait état de la présence de milieux humides, sans donner plus de détails, contrairement à ce que soutient M. Verronneau. Le plaignant n’a donc pas prouvé que cette information était inexacte. Ce point du grief est rejeté. »
Dans son analyse, le Conseil a contacté la Gendarmerie royale du Canada (GRC) qui a spécifié que les « trois armes [mentionnées dans l’article] sont toutes des variantes semi-automatiques d’armes de type militaire ou tactique et l’utilisation du terme fusil d’assaut pour les décrire est parfaitement justifiée en tenant compte de l’usage de ce terme dans la langue française ».
Au vu de cette précision, le Conseil estime qu’il est justifié d’utiliser le terme « fusils d’assaut » pour désigner ces armes. De plus, le Conseil juge que la réplique de la journaliste témoigne qu’elle a bien effectué ses recherches.
Le grief d’information inexacte est rejeté sur ce point.
1.2 Mitraillettes
Deux plaignants considèrent qu’il est inexact de présenter les trois armes mentionnées comme des « mitraillettes ». M. Turcotte affirme que dans les fiches descriptives des armes Cz et Sig, la journaliste indique que ce sont des mitraillettes, alors que les armes automatiques seraient pourtant prohibées au Canada. Il affirme que ces deux armes sont « de simples carabines semi-automatiques ».
La journaliste précise que « ce sont les fabricants qui décrivent eux-mêmes ces armes comme des “submachine guns” sur leurs sites web respectifs. En français, cela se traduit par mitraillette. [Elle] sai[t] que dans certains dictionnaires, cela réfère à une arme automatique (d’autres parlent seulement de “pistolets mitrailleurs”), mais celles dont il est question ici, ne le sont pas. Cela est clairement mentionné dans l’article. »
Les recherches du Conseil n’ont pas permis de conclure à un manquement de la part de la journaliste. Le Conseil juge que la journaliste a mis en contexte l’utilisation du mot « mitraillette », en précisant dans l’article que ces armes sont semi-automatiques.
De plus, Mme Berthiaume a employé le terme « mitraillette », qui est le mot français pour « submachine gun », utilisé sur les sites des fabriquants pour qualifier ces armes. Elle mentionne également que ce sont les fabricants qui qualifient ces armes de « mitraillettes ».
Le Conseil est donc d’avis que la journaliste a pris les moyens raisonnables pour qualifier les armes en question.
Le grief d’informations inexactes est rejeté sur ce point.
Au vu de ce qui précède, le grief d’informations inexactes est rejeté.
Grief 2 : information incomplète
Deux plaignants considèrent que l’article mis en cause omet de l’information concernant les vérifications effectuées lors d’une demande d’un permis de possession et d’acquisition d’armes à feu (PPA). À cet effet, M. Turcotte déplore qu’il n’y ait aucune « mention du fait que les demandeurs de permis subiront une enquête officielle de la GRC et que des répondants sont appelés et questionnés à propos du demandeur ».
Le Guide prévoit, à l’article 9 alinéa e), que « les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : […] e) complétude : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. »
Mme Berthiaume précise que la section « Qui peut acheter ces armes? » « se voulait une boîte d’information résumée et concise. Les points mentionnés sont des catégories non exhaustives de choses qu’une personne désirant obtenir une arme à autorisation restreinte doit faire. »
Dans le dossier D2015-10-052, le Conseil indique qu’un « journaliste est toujours libre d’exclure certaines informations, pour peu que ce choix ne prive pas le public d’informations essentielles, considérant l’angle de traitement choisi ».
Dans la décision D2016-07-013, le Conseil rappelle que sa jurisprudence « n’impose pas aux journalistes de couvrir tous les angles d’une nouvelle, mais plutôt de s’assurer d’en présenter les éléments essentiels à la compréhension des faits par le lecteur ».
Après analyse, le Conseil constate que les points d’information sur le PPA ne constituent pas l’objet principal de l’article. De plus, l’élément mentionné, soit « rencontrer un policier », permet de saisir qu’une enquête est effectuée sur le demandeur de permis.
Le grief d’information incomplète est rejeté.
Refus de collaborer
Le Conseil déplore le refus de collaborer des sites Internet journaldemontreal.com et journaldequebec.com, qui ne sont pas membre du Conseil de presse. Il a toutefois tenu compte des explications de la journaliste dans son analyse des griefs et sa décision.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de MM. Hugo Plouffe, Mario Junior Benoit et Pierre-Yves Turcotte contre la journaliste Claudia Berthiaume et les sites Internet journaldemontreal.com et journaldequebec.com pour les griefs d’informations inexactes et d’information incomplète.
Linda Taklit
Présidente du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
- M. Luc Grenier
- Mme Linda Taklit
Représentants des journalistes :
- M. Simon Chabot
- Mme Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
- M. Pierre-Paul Noreau
- M. Éric Trottier