Plaignant
Dominic Perri
Mis en cause
La Presse canadienne
Le quotidien La Presse
Résumé de la plainte
Dominic Perri dépose une plainte le 28 mai 2019 contre l’article « Crime organisé : la ministre Guilbault craint des victimes collatérales », rédigé par la Presse canadienne et publié sur le site Internet lapresse.ca, le 13 mai 2019. Le plaignant déplore de la discrimination et un refus de correction.
CONTEXTE
L’article mis en cause rapporte les inquiétudes de la ministre de la Sécurité publique du Québec concernant des meurtres impliquant des membres du crime organisé. Il revient notamment sur le meurtre d’un homme lié à la mafia.
Analyse
Grief 1 : discrimination
Principe déontologique applicable
Discrimination : « (1) Les journalistes et les médias d’information s’abstiennent d’utiliser, à l’endroit de personnes ou de groupes, des représentations ou des termes qui tendent, sur la base d’un motif discriminatoire, à susciter ou attiser la haine et le mépris, à encourager la violence ou à entretenir les préjugés. (2) Les journalistes et les médias d’information ne font mention de caractéristiques comme la race, la religion, l’orientation sexuelle, le handicap ou d’autres caractéristiques personnelles que lorsqu’elles sont pertinentes. » (article 19 du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
Le Conseil doit déterminer si l’utilisation de l’adjectif « italienne » entretient les préjugés envers la communauté italienne dans les passages suivants :
1) « Et le 4 mai, en fin de soirée, un homme lié à la mafia italienne »
2) « Les policiers mèneront des contrôles aléatoires et exécuteront des mandats dans des endroits fréquentés par des organisations criminelles italiennes. »
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette le grief de discrimination.
Analyse
Le plaignant estime que le fait de préciser qu’il s’agit de la mafia italienne et d’organisations criminelles italiennes stigmatise les membres de la communauté italienne. Or, comme le souligne l’éditrice et directrice générale de la Presse canadienne, Geneviève Rossier, l’adjectif « italienne » se rapporte à la mafia et n’attribue pas à toute la population d’origine italienne le caractère criminel de la mafia.
Le Conseil juge que la précision sur l’origine ethnique de cette organisation criminelle n’est pas discriminatoire envers les personnes d’origine italienne. Rapporter des histoires au sujet de la mafia italienne n’entretient pas de préjugé envers les membres de la communauté italienne de façon générale, qui n’ont rien à voir avec le crime organisé.
De plus, dans le cas présent, il était pertinent, par souci de clarté pour le lecteur, de spécifier qu’il s’agissait de la mafia italienne et d’organisations criminelles italiennes, puisqu’il existe plusieurs types de mafias et d’organisations criminelles. La mafia italienne n’est pas la même organisation criminelle que la mafia russe ou que la mafia asiatique, par exemple. Le terme « mafia », qui est défini par le dictionnaire Larousse comme une « bande ou association secrète de malfaiteurs », peut décrire plusieurs organisations criminelles.
Dans une décision antérieure du Conseil D2018-05-054(2), qui portait également sur une plainte de discrimination, le plaignant estimait que la précision au sujet du lieu où un drame s’était déroulé entretenait des préjugés envers les Autochtones. Le lieu était décrit comme un « immeuble de logements à prix modiques qui abrite des Autochtones hors réserve ». La Commission d’appel a jugé que cette précision apportait « un élément important dans la compréhension des événements, complétant le portrait de ce qui est survenu dans le cadre d’un fait divers, sans que cela n’entretienne de préjugés envers les gens qui habitent ce lieu-là. La phrase mise en cause […] décrit le lieu où se sont produits les événements et ne vise pas directement des personnes », précise la décision.
De la même façon dans le cas présent, l’adjectif « italienne » décrit un type de mafia et ne vise pas directement les personnes issues de la communauté italienne. Indiquer qu’il s’agit de la mafia italienne ou d’organisations criminelles italiennes apporte plutôt un élément d’information pertinent et d’intérêt public pour les lecteurs.
Grief 2 : refus de correction
Principe déontologique applicable
Correction des erreurs : « Les journalistes et les médias d’information corrigent avec diligence leurs manquements et erreurs, que ce soit par rectification, rétractation ou en accordant un droit de réplique aux personnes ou groupes concernés, de manière à les réparer pleinement et rapidement. » (article 27.1 du Guide)
Le Conseil doit déterminer si les mis en cause ont manqué à leur devoir de correction.
Décision
Le Conseil rejette le grief de refus de rectification.
Analyse
Bien que le quotidien La Presse ait modifié l’article en enlevant le qualificatif accolé au terme « mafia », cela ne signifie pas qu’il y avait une faute déontologique à la base.
Le Conseil n’ayant constaté aucun manquement déontologique au grief précédent, le grief de refus de correction est rejeté.
Décision
Le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de Dominic Perri contre La Presse canadienne et lapresse.ca concernant les griefs de discrimination et de refus de correction.
Michel Loyer
Président du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Michel Loyer
Richard Nardozza
Représentants des journalistes :
Martin Francoeur
Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
Pierre Champoux
Marie-Andrée Prévost