D2023-09-064

Plaignant

Jean-François Lisée

Mis en cause

Thomas Mulcair, chroniqueur

Le quotidien Le Journal de Montréal

Le quotidien Le Journal de Québec

Québecor Média

Date de dépôt de la plainte

Le 19 septembre 2023

Date de la décision

Le 26 avril 2024

Résumé de la plainte

Jean-François Lisée dépose une plainte le 19 septembre 2023 au sujet de la chronique « Paul St-Pierre Poilievre ou l’intolérance comme arme politique », du chroniqueur Thomas Mulcair, publiée dans Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec le 14 septembre 2023. Le plaignant déplore des informations inexactes.

Contexte

Dans la chronique visée par la plainte, l’ex-politicien Thomas Mulcair critique la sortie publique du chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, au sujet de l’identité de genre. Le 12 septembre 2023, le chef péquiste s’est inquiété que des idéologies qu’il attribue à la « gauche radicale » s’imposent dans les écoles, notamment la présence de toilettes mixtes, les pronoms neutres et l’écriture inclusive, et il a demandé au gouvernement québécois la tenue d’une commission parlementaire. 

Dans sa chronique, M. Mulcair estime que « la substance de ce que M. St-Pierre Plamondon a dit cette semaine sur l’identité de genres constitue un lamentable retour à ce populisme contre une minorité prise pour cible à des fins électorales et c’est abject ».

Plus tôt dans sa chronique, M. Mulcair avance que « le PQ s’est enlisé dans un bourbier d’intolérance populiste lors de sa course à la chefferie en 2016 ». Le chroniqueur rappelle les propos tenus à l’époque par l’un des candidats dans cette course à la chefferie. Bien qu’il ne le nomme pas, les propos en question sont ceux de Jean-François Lisée, plaignant dans le présent dossier. 

À son sujet, le chroniqueur affirme : 

« Rappelons aussi qu’en 2016, des péquistes de gauche comme Agnès Maltais avaient sonné l’alarme lorsqu’un candidat à la chefferie du parti avait affirmé que les musulmanes qui portaient le voile intégral constituaient une menace pour la sécurité.

Du bon travail journalistique avait vite permis de débusquer cette supercherie.

Aucun corps de police n’était d’accord avec cette affirmation qui était dénoncée par Maltais comme une tentative de faire peur aux Québécois.

Maltais était dans le camp d’un autre candidat à la chefferie, Alexandre Cloutier, un progressiste qui a mordu la poussière lors de cette lutte et qui a depuis quitté la vie politique.

Le candidat victorieux à l’époque avait plaidé qu’il voulait seulement provoquer un “débat public” sur le port du voile intégral. »

Le 19 septembre 2023, quelques jours après la publication de la chronique visée par la plainte, le site du Journal de Montréal publie une réplique intitulée « Réplique de Jean-François Lisée : la méthode Mulcair », dans laquelle l’ex-chef du Parti québécois affirme que Thomas Mulcair a trahi les faits le concernant dans sa chronique. 

Dans cette réplique, on retrouve un lien vers un épisode d’un balado animé par Richard Martineau et diffusé à QUB Radio qui s’intitule « La rencontre Lisée Mulcair ». Au cours de cette discussion, Jean-François Lisée déplore l’inexactitude de certains faits présentés dans la chronique de Thomas Mulcair et lui demande d’admettre son erreur. De son côté, Thomas Mulcair donne sa version des faits, estimant que les reproches de M. Lisée sont plutôt une question d’opinion. 

Principe déontologique relié au journalisme d’opinion 

Journalisme d’opinion : (1) Le journaliste d’opinion exprime ses points de vue, commentaires, prises de position, critiques ou opinions en disposant, pour ce faire, d’une grande latitude dans le choix du ton et du style qu’il adopte. (2) Le journaliste d’opinion expose les faits les plus pertinents sur lesquels il fonde son opinion, à moins que ceux-ci ne soient déjà connus du public, et doit expliciter le raisonnement qui la justifie. (3) L’information qu’il présente est exacte et complète, tel que défini à l’article 9 du présent Guide. (article 10.2 du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)

Griefs du plaignant

Grief 1 : informations inexactes

Principe déontologique applicable

Qualités de l’information : « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité. » (article 9 a) du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)

1.1 Musulmanes

Le Conseil doit déterminer si le chroniqueur a transmis de l’information inexacte dans le passage suivant :  

« Un candidat à la chefferie du parti avait affirmé que les musulmanes qui portaient le voile intégral constituaient une menace pour la sécurité. »

Décision

Le Conseil de presse du Québec retient le grief d’informations inexactes sur ce point.

Analyse

Le plaignant, M. Lisée, affirme que « la source d’origine ne visait pas les musulmanes, mais les terroristes qui pouvaient utiliser ce vêtement pour commettre leurs crimes ». 

Il met en preuve le texte qu’il a publié le 17 août 2016 sur sa page Facebook. Il cite le passage suivant de cette publication : 

« Comme toutes les autres sociétés, le Québec devra débattre, bientôt, de l’interdiction de la burqa, du niqab et du burkini dans l’espace public.

Pourquoi?

1. Nous avons un ennemi déclaré, l’État islamique, qui recrute ici des gens pour poser des bombes. Notre seul choix est de débattre de l’interdiction de la burqa AVANT qu’un djihadiste s’en serve pour cacher ses mouvements pour un attentat, ou APRÈS.

Cela peut paraître un argument excessif aujourd’hui, où le nombre de burqas à Montréal est limité. Il l’était aussi, il y a 15 ans à peine, à Molenbeek, cette banlieue de Bruxelles où, aujourd’hui, elles sont répandues au point que le travail des policiers est significativement handicapé pour reconnaître les suspects. »

Les mis en cause n’ont pas répondu à la plainte.

Le 19 septembre 2023, le média a accordé un droit de réplique à Jean-François Lisée. Au bas de ce texte intitulé « Réplique de Jean-François Lisée : la méthode Mulcair », M. Lisée affirme que Thomas Mulcair a trahi les faits dans sa chronique. Cette réplique est suivie d’une réponse du chroniqueur qui affirme : « On peut différer d’opinions et avoir une lecture différente des faits. »

Dans la réplique se trouve un lien vers un balado présenté ainsi : « Écoutez en balado la Rencontre de Jean-François Lisée et Thomas Mulcair où les deux hommes s’expliquent en direct lors de l’épisode de Richard Martineau disponible sur la plateforme audio et vidéo QUB radio ». Le jour de la publication de la chronique, Thomas Mulcair et Jean-François Lisée reviennent sur la chronique. À plusieurs reprises, Jean-François Lisée affirme que la chronique présente des faits qui « sont contraires à la réalité ». De son côté, Thomas Mulcair affirme qu’il s’agit de son opinion.

Au cours de cette discussion, M. Mulcair fait valoir :  

« Le propos que je tenais et que je tiens encore, c’est qu’il y en a qui utilise le malaise des gens avec la manière de d’autres personnes d’exprimer leur religion en différentes formes et le public, on le sait, est très mal à l’aise dans le débat actuel et mon papier était là-dessus. Dans le débat actuel autour de l’identité de genre et il y en a qui essaie de faire du capital politique avec ça et justement parce qu’on a des sondages qui prouvent ce malaise pour ce qui est des musulmanes et ce qu’elles portent, on trouve toutes sortes de combines, toutes sortes de prétextes, toutes sortes de manières de s’y prendre pour aller chercher ces malaises-là et les gens qui le sentent et dire “Moi, je suis comme toi, j’ai ce malaise-là et je vais même te donner des raisons pour lesquelles on peut avoir ce malaise-là.”

Moi j’ai pas de malaise avec les gens qui expriment leur religion de différentes manières. J’ai pas de malaise avec des gens qui ont une identité de genre différente du mien, mais on va quand même reconnaître le fait, qu’ici au Québec, on a eu plus que notre part… 

[…] 

Alors Jean-François vient de donner sa version, ça ne me tente pas d’embarquer dans ces détails-là parce que moi je sais ce qui est en cause ici, de mon point de vue. On a une opinion différente. Jean-François plaide qu’il parlait d’un fait public, mais il sait très bien que tout se décide dans un contexte, tout se dit dans un contexte. » 

Selon M. Mulcair, les éléments pointés par le plaignant relèvent de son opinion. 

Avant de poursuivre l’analyse du grief, il importe de déterminer si la phrase visée par la plainte (« Un candidat à la chefferie du parti avait affirmé que les musulmanes qui portaient le voile intégral constituaient une menace pour la sécurité ») exprime l’opinion du chroniqueur ou si elle rapporte un fait. 

Lorsque Thomas Mulcair résume les propos tenus par Jean-François Lisée en 2016, il présente des faits. Bien que les chroniqueurs bénéficient d’une grande latitude pour exprimer leur opinion, les faits qu’ils rapportent doivent être exacts.

Dans le cas présent, de nombreuses sources permettent de constater que Jean-François Lisée n’a pas affirmé ce que le chroniqueur prétend. Lorsque M. Lisée affirme dans sa publication Facebook de 2016 : « Notre seul choix est de débattre de l’interdiction de la burqa AVANT qu’un djihadiste s’en serve pour cacher ses mouvements pour un attentat, ou APRÈS », il parle d’individus isus des mouvements islamiques militants et ne fait aucunement référence aux femmes musulmanes qui portent la burqa.

Les articles publiés dans les médias à cette époque témoignent du fait qu’il n’y avait pas d’ambiguïté dans la proposition amenée par celui qui était alors candidat à la chefferie du Parti québécois. Dans l’article « Lisée ouvert à bannir le voile intégral », paru dans La Presse le 15 septembre 2016, on peut lire : « M. Lisée fait valoir que 10 pays européens ont légiféré contre le port du voile intégral. Selon lui, cette tenue vestimentaire pose un problème de sécurité, puisque les personnes qui le portent ne peuvent être reconnues par des témoins ou par des caméras de surveillance. »

La position de Jean-François Lisée est également claire dans l’extrait suivant de l’article intitulé « Voile intégral : Lisée tente de faire “peur” aux Québécois, dit Maltais », publié dans Le Devoir le 16 septembre 2016 : 

« En fait, selon M. Lisée, c’est M. Cloutier qui est irresponsable de refuser le débat sur le port du niqab et de la burqa en public. Après tout, a-t-il rappelé, 10 pays européens ont légiféré en ce sens.

“Si on nous dit qu’il n’y a aucun problème et que ça ne se pourrait pas que des suspects utilisent ça pour se soustraire à la surveillance policière, ça va se refroidir considérablement, a-t-il dit. Refuser de demander aux spécialistes de la sécurité ce qu’ils en pensent, ce qui est leur expérience en Europe, je pense que ce n’est pas responsable.” »

En affirmant qu’« un candidat à la chefferie du parti avait affirmé que les musulmanes qui portaient le voile intégral constituaient une menace pour la sécurité », Thomas Mulcair présente un fait qui n’est pas fidèle à la réalité puisque les propos largement médiatisés de l’époque démontrent qu’en aucun cas Jean-François Lisée n’a affirmé que les femmes musulmanes portant le voile intégral constituaient une menace pour la sécurité. Il a plutôt évoqué que des personnes malveillantes pourraient utiliser des burqas pour commettre des actes dangereux sans être reconnues. Bien qu’on puisse être en vif désaccord avec cet avis, on ne peut pas faire dire à M. Lisée ce qu’il n’a pas dit.

Un chroniqueur peut résumer les faits sur lesquels il se prononce, mais il ne peut faire un raccourci qui les dénature. Dans la décision D2018-04-049, le Conseil a retenu le grief d’information inexacte qui visait une chronique dans laquelle Lise Ravary commentait une chronique de Fabrice Vil à propos de la disparition d’un jeune garçon noir. Le Conseil a jugé que la chroniqueuse avait attribué à M. Vil une opinion qu’il n’avait pas émise lorsqu’elle a affirmé : « de dire que cet enfant-là, on ne met pas les ressources, les mêmes ressources pour le trouver, qu’on mettrait sur un… » La chroniqueuse revenait sur le passage suivant de la chronique de Fabrice Vil : « En 2018, un enfant de 10 ans disparu qui se trouve à être noir ne peut pleinement bénéficier du soutien élémentaire que mérite un enfant de 10 ans disparu. Il doit subir les foudres d’internautes qui formulent à son égard des remarques racistes beaucoup trop violentes pour que je les reproduise ici. » Le Conseil a fait valoir que : « Lise Ravary cite la première phrase de Fabrice Vil, et affirme que ce dernier, quand il parle de “soutien élémentaire”, dénonce un manque de ressources pour retrouver l’enfant. Pourtant, la deuxième phrase de Fabrice Vil précise bien ce qu’entend le chroniqueur par “soutien élémentaire”, à savoir celui de la population. »

De la même façon, dans le cas présent, les faits rapportés par Thomas Mulcair à propos de la position défendue par Jean-François Lisée ne sont pas fidèles à la réalité.

1.2 Corps de police

Le Conseil doit déterminer si le chroniqueur a transmis de l’information inexacte dans le passage suivant : 

« Du bon travail journalistique avait vite permis de débusquer cette supercherie. 

Aucun corps de police n’était d’accord avec cette affirmation qui était dénoncée par Maltais comme une tentative de faire peur aux Québécois. »

Décision

Le Conseil rejette le grief d’informations inexactes sur ce point.  

Analyse 

Le plaignant déplore de l’information inexacte dans le passage ci-dessus. Il fait valoir que « le chroniqueur ne cite aucune source à l’appui de cette affirmation, mais il est probable qu’il s’appuie sur un texte du Devoir qui, malgré un titre trompeur, ne fait que constater que 1) la GRC refuse de commenter et 2) la SQ et le SPVM affirment ne détenir aucun “rapport” ou aucune “étude”. En aucun cas le journaliste ne leur a demandé leur opinion sur [s]on affirmation, ils ne l’ont donc pas commenté. Il est donc inexact d’affirmer, comme le fait le chroniqueur du Journal de Montréal, que cette “supercherie” a été “débusquée” encore moins de dire qu’aucun corps de police “n’étaient d’accord”. Ils ne se sont pas prononcés. Par ailleurs, des crimes ont été commis – non par des terroristes, mais par des criminels – au Canada et aux États-Unis, les criminels utilisant le voile intégral pour se cacher, comme je l’ai indiqué. » 

Le plaignant met en preuve des articles qui relatent des crimes dont les auteurs ont endossé le voile intégral pour déjouer la vigilance des victimes ou pour cacher leur identité aux autorités policières.

Selon le plaignant, le travail journalistique auquel fait référence le chroniqueur dans le passage visé est l’article « Les craintes de Lisée dégonflées par les policiers », paru dans Le Devoir le 25 octobre 2016. Dans le premier paragraphe de ce texte, le journaliste Marco Bélair-Cirino rapporte la réaction de deux corps policiers aux propos de Jean-François Lisée : 

« Les deux principaux corps de police au Québec ne partagent pas les craintes du chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, de voir un terroriste se dissimuler sous une burqa ou un niqab. Ni la Sûreté du Québec (SQ) ni le Service de police de Montréal (SPVM) ne détiennent actuellement de “rapport” ou d’“étude” portant sur une menace d’attaque terroriste impliquant ces vêtements couvrant pratiquement tout le corps, y compris le visage. »

L’article rappelle les propos tenus par Jean-François Lisée lors d’une entrevue avec Le Devoir, le 16 septembre 2016, durant la course au leadership du PQ : 

« “Ma première responsabilité si je suis premier ministre, c’est la sécurité des citoyens du Québec”, avait-il déclaré solennellement durant la table éditoriale tenue par Le Devoir le 16 septembre dernier. “En Afrique, les AK47 sous les burqas, c’est avéré là. Mais moi, ce qui me préoccupe et ce qui préoccupe les policiers européens, c’est l’incapacité de repérer dans une foule des suspects qui ont commis ou qui [pourraient] commettre [un attentat]”, avait-il ajouté. 

À la question “Est-ce que les policiers réclament [l’interdiction de la burqa ou du niqab]?”, le député de Rosemont avait rétorqué : “Avez-vous parlé aux policiers? Faites votre travail : parlez-leur, écoutez-les! Oui, je me suis renseigné sur ces questions-là.” »

Dans l’article du 25 octobre 2016, le journaliste poursuit : 

« Le Devoir a pris au mot M. Lisée et a demandé à la SQ, au SPVM ainsi qu’à la Gendarmerie royale du Canada (GRC) s’ils avaient demandé à un expert interne ou externe de mesurer le risque posé par ces pièces d’étoffe. 

Le SPVM n’a “retracé aucun document” de la sorte, a répondu le chef de section des Archives, Benoît Robitaille à une demande d’information faite par Le Devoir en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics.

Même si elle constitue une actrice-clé dans la lutte contre le terrorisme, la SQ ne possède aucun document du genre et n’en a pas commandé à ce jour, a affirmé le capitaine Guy Lapointe après quelques vérifications.

La GRC a pour sa part opposé une fin de non-recevoir à la demande de renseignements du Devoir. “La GRC n’a pas de rapport qu’elle émet publiquement en ce qui a trait aux menaces d’attaques terroristes que pourrait subir le Canada”, a indiqué la caporale Annie Delisle. Si la GRC a en main une étude sur la burqa ou le niqab, elle n’a pas cru nécessaire de la porter à l’attention du SPVM ou de la SQ, a souligné une source policière à micros fermés. »

L’article conclut en indiquant : 

« Le chef péquiste ne souhaitait pas commenter lundi l’absence d’études sur le voile intégral dans les quartiers généraux du SPVM et de la SQ. »

Le plaignant, M. Lisée, considère qu’il est inexact d’affirmer que « du bon travail journalistique avait vite permis de débusquer cette supercherie » et qu’« aucun corps de police n’était d’accord avec cette affirmation qui était dénoncée par Maltais comme une tentative de faire peur aux Québécois » puisque les corps policiers ne se sont pas prononcés. Il s’agit de sa lecture des faits présentés dans l’article du Devoir. Cependant, dans ce cas, il ne fait pas la démonstration que la façon dont Thomas Mulcair rapporte les faits est inexacte.

Le plaignant met en preuve des articles rapportant que des crimes ont été commis en utilisant le voile intégral musulman. Cela indique, comme le prétendait M. Lisée en 2016, que des malfaiteurs ont utilisé ce genre de vêtement pour cacher leur identité, mais cela ne prouve pas que les corps policiers étaient d’accord avec lui quant à la menace que le voile intégral représenterait pour la sécurité de la population.

En l’absence de preuve, un grief ne peut être retenu, comme le rappelle la décision D2018-04-037, dans laquelle on lit : « Lorsque le Conseil examine une allégation d’inexactitude, il ne retient le grief que s’il a une preuve démontrant qu’une information inexacte a été véhiculée. Comme l’a souligné le Conseil dans la décision D2004-07-006, “il revient au plaignant de faire la preuve des accusations qu’il formule”. Devant des versions contradictoires, le Conseil se voit dans l’obligation de rejeter le grief d’information inexacte, ce qui signifie qu’il n’a pas les preuves nécessaires pour trancher à propos de l’inexactitude alléguée. Dans le cas présent, le Conseil se trouvant devant deux versions contradictoires, dont il ne peut trancher l’exactitude, il donne le bénéfice du doute au journaliste, comme il l’a fait dans ses décisions antérieures, par exemple la décision D2016-01-085 (2). »

Pareillement, dans le présent dossier, rien n’indique qu’il était inexact de soutenir qu’« aucun corps de police n’était d’accord avec cette affirmation qui était dénoncée par Maltais comme une tentative de faire peur aux Québécois ». En l’absence de preuve démontrant qu’il était inexact d’écrire qu’« aucun corps de police n’était d’accord avec cette affirmation », il est impossible de retenir le grief. 

En ce qui concerne la phrase qui précède cet extrait et qui affirme que « du bon travail journalistique avait vite permis de débusquer cette supercherie », elle est liée à celle concernant la position des corps policiers. Rien ne démontre qu’il était inexact d’affirmer que « du bon travail journalistique avait vite permis de débusquer cette supercherie »; cette phrase témoignant plutôt de l’opinion de Thomas Mulcair.

Note

Le Conseil de presse déplore le refus de collaborer du Journal de Montréal et du Journal de Québec, qui ne sont pas membres du Conseil et n’ont pas répondu à la présente plainte.

Conclusion

Le Conseil de presse du Québec retient la plainte de Jean-François Lisée visant la chronique « Paul St-Pierre Poilievre ou l’intolérance comme arme politique », publiée le 14 septembre 2023, et blâme le chroniqueur Thomas Mulcair, Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec concernant l’un des griefs d’informations inexactes. 

Par ailleurs, le Conseil rejette le second grief d’information inexacte.

La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :

Représentants du public

François Aird, président du comité des plaintes

Mathieu Montégiani

Représentants des journalistes

Vincent Brousseau-Pouliot

Jessica Nadeau

Représentants des entreprises de presse

Sophie Bélanger

Stéphan Frappier