Conflits de voisinage et mariées insatisfaites : l’importance de l’équilibre des points de vue

Le Conseil de presse du Québec a publié trois nouvelles décisions relatives à des plaintes qu’on lui avait soumises. Il a retenu les trois plaintes, en tout ou en partie.

D2024-02-010 : André Saint-Amant c. Étienne Fortin-Gauthier et Noovo Info

Le Conseil de presse retient la plainte d’André Saint-Amant au sujet du reportage « Plainte de bruit : un bar du village doit fermer pendant 4 jours », diffusé sur le site Web et la chaîne télé de Noovo Info le 29 janvier 2024, relativement à un grief de manque d’équilibre. Pour illustrer les enjeux liés à la nouvelle politique de vie nocturne de la Ville de Montréal, le journaliste Étienne Fortin-Gauthier va à la rencontre de Danny Jobin, propriétaire du bar District Vidéo Lounge. Ce dernier affirme avoir été mis à l’amende à maintes reprises en raison de « l’acharnement » d’un voisin qui a déposé de nombreuses plaintes pour bruit. 

Le Conseil juge qu’en ne présentant pas le point de vue du voisin en question, M. Saint-Amant, le journaliste a manqué à son devoir d’équilibre. On peut lire dans la décision : « Dans un conflit, le public ne peut pas avoir un portrait fidèle de la situation s’il n’a que le point de vue d’une des deux parties. Le rôle du journaliste, s’il y a deux points de vue qui s’opposent concernant la même histoire, est de présenter ces points de vue, tout en les mettant à l’épreuve des faits. […] La tentative du journaliste de contacter le plaignant, passée sous silence dans le reportage, était insuffisante et ne justifiait pas la diffusion d’une seule facette d’une histoire controversée. […] Considérant que ni la perspective de M. Saint-Amant ni celle d’autres voisins irrités par le bruit n’est présentée dans le reportage, les téléspectateurs n’ont pas eu accès à une présentation pondérée de la perspective des parties en présence. »

D’autre part, le Conseil rejette trois griefs d’informations inexactes.

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D2024-05-037 : André Saint-Amant c. Laurent Lavoie, Olivier Faucher, Le Journal de Montréal et TVA Nouvelles

Le même plaignant, André Saint-Amant, a également déposé une plainte visant l’article et le segment vidéo « Bruit excessif : les plaintes incessantes d’un voisin coûtent 100 000 $ de rénos à un bar du Village », diffusés le 3 mai 2024 sur les sites Web du Journal de Montréal et de TVA Nouvelles. Les griefs de manque d’équilibre et d’information inexacte sont tous deux retenus. Dans ce reportage, les journalistes donnent la parole à Danny Jobin, propriétaire du bar District Vidéo Lounge, à Montréal, qui fait part des déboires qu’il vit en lien avec les plaintes de bruit formulées contre son établissement. D’après M. Jobin, les plaintes répétées et « injustifiées » sont dues à « l’entêtement d’un homme habitant en face du bar […] qui fait des plaintes sur tout, tout, tout ».

Le Conseil souligne dans sa décision : « Le fait que le voisin, M. Saint-Amant, ne soit pas nommé dans le récit ne change pas le fait que le reportage manque d’équilibre, car le public n’a pas pu connaître sa version des événements, qui […] diffère considérablement de celle du propriétaire du bar. » En ce qui a trait aux moyens pris par les journalistes pour s’efforcer de présenter un reportage équilibré, les tentatives qui ont été faites pour joindre André Saint-Amant (deux appels à sept minutes d’intervalle en fin d’après-midi) « étaient nettement insuffisantes, d’autant plus qu’il n’y avait aucune urgence justifiant de publier ce reportage [le soir même] sans inclure son point de vue. De plus, malgré que le plaignant ait retourné les appels du journaliste Laurent Lavoie le lendemain de la publication du reportage en cause, ni Le Journal de Montréal ni TVA Nouvelles n’ont publié sa version des faits. » C’est pourquoi le grief de manque d’équilibre est retenu.

Le Conseil retient également un grief d’information inexacte portant sur le fait que les plaintes de bruit contre le bar proviennent « d’un seul voisin ». Une décision de la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) – qui est du domaine public et dont les journalistes citent un extrait dans l’article – démontre « sans contredit l’existence d’au moins un autre plaignant dans l’affaire du bar District Vidéo Lounge. […] Les journalistes avaient le devoir de vérifier cette information […] plutôt que de rapporter comme un fait avéré l’information inexacte fournie par le propriétaire Danny Jobin », peut-on lire dans la décision.  

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D2024-02-014 : Cassandra Bourret c. Kathryne Lamontagne, Richard Olivier, Maude Boutet, Émission « J.E. » (TVA), Le Journal de Montréal, Le Journal de Québec, TVA Nouvelles et QUB Radio

Le Conseil de presse retient la plainte de Cassandra Bourret, propriétaire de La Boutique Champagne!, à propos du reportage « Le pire du mariage », de l’émission « J.E. » diffusée le 12 janvier 2024 à TVA et sur le site Internet de TVA Nouvelles, ainsi que huit articles publiés à la même date dans Le Journal de Montréal, Le Journal de Québec, sur le site Internet de TVA Nouvelles et celui de QUB Radio, concernant un grief de manque d’équilibre.

Le reportage de l’émission « J.E. » et les huit articles qui en découlent présentent les insatisfactions de trois femmes relativement à leur robe de mariée achetée à La Boutique Champagne!. Le Conseil retient le grief de manque d’équilibre en faisant valoir que « le reportage et les articles ne témoignent pas du fait que la plaignante [et propriétaire de la boutique] ait eu accès aux reproches des clientes afin de pouvoir y répondre de façon précise. Les passages du reportage télévisé et des articles qui offrent le point de vue de La Boutique Champagne! présentent une défense générale – on y cite même la mission de l’entreprise – et ne répondent pas aux allégations avancées. Afin d’obtenir des réponses aux cas concrets présentés dans le reportage et les articles, les journalistes devaient présenter à la plaignante les faits qui seraient exposés afin de lui donner l’opportunité d’y répliquer. En ne le faisant pas, les journalistes n’ont obtenu que des réponses générales de la part de la plaignante. Ces propos, rapportés dans le reportage et dans les articles, ne constituent pas une juste pondération du point de vue des parties en présence. »  

Le Conseil retient également un grief d’information inexacte qui visait uniquement l’article  « Une robe de mariée… verte », publié le 12 janvier 2024 dans Le Journal de Montréal. Par ailleurs, quatre autres griefs d’informations inexactes et cinq griefs de sensationnalisme sont rejetés.

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