Le Conseil de presse du Québec a publié deux nouvelles décisions relativement à des plaintes qu’on lui avait soumises. Il en a retenu une et a rejeté l’autre.
D2022-11-220 / D2023-01-004 : Améli Pineda et Suzanne Cholette c. Isabelle Hachey, Marie-Ève Tremblay, La Presse et le 98,5 FM
Le Conseil de presse retient la plainte d’Améli Pineda visant l’article « L’affaire Julien Lacroix, deux ans plus tard – Des cicatrices et des regrets » et le balado « L’affaire Julien Lacroix, deux ans plus tard », publiés le 16 novembre 2022, concernant des griefs d’informations incomplètes et de manque d’équilibre et blâme les journalistes Isabelle Hachey et Marie-Ève Tremblay ainsi que le quotidien La Presse et la station de radio 98,5 FM. Le Conseil retient également les plaintes d’Améli Pineda et de Suzanne Cholette concernant un grief d’apparence de conflit d’intérêts de Marie-Ève Tremblay.
L’enquête conjointe d’Isabelle Hachey et Marie-Ève Tremblay visée par les plaintes présente les témoignages de femmes qui ont dénoncé les agissements de l’humoriste Julien Lacroix dans une enquête du Devoir de 2020 intitulée « Julien Lacroix visé par des allégations d’agressions et d’inconduites sexuelles » et signée par la journaliste Améli Pineda (l’une des plaignantes dans ce dossier). L’article et le balado rapportent que « des femmes regrettent de l’avoir dénoncé […] Avec le recul, ces femmes reviennent sur les dénonciations publiques et leurs dommages collatéraux ».
Le Conseil explique le manque d’équilibre de cette enquête conjointe ainsi : « Étant donné que Le Devoir était l’une des parties en présence directement visées par cette nouvelle enquête, les journalistes avaient l’obligation déontologique de présenter une juste pondération de la perspective du Devoir dans cette affaire. Cela aurait entre autres pu se faire en présentant clairement au Devoir les éléments qui remettaient en question son travail journalistique, afin que Le Devoir puisse y répondre en toute connaissance de cause, ou en faisant état des multiples suivis réalisés par Le Devoir à la suite de son enquête de 2020. »
Le Conseil considère par ailleurs que les journalistes ont transmis de l’information incomplète dans le passage évoquant le refus du Devoir d’accorder une entrevue. En affirmant que « le quotidien a accepté notre demande, à condition d’obtenir nos questions à l’avance », les journalistes faisaient abstraction de plusieurs raisons importantes du refus du Devoir et empêchaient le public de bien comprendre ce refus.
En ce qui concerne le conflit d’intérêts allégué par les plaignantes, le Conseil estime que la journaliste Marie-Ève Tremblay n’a pas évité de se placer en situation d’apparence de conflit d’intérêts en interviewant pour son enquête la conjointe de Julien Lacroix, Maude Sabbagh, sans clarifier au public la nature de sa relation avec elle. Mme Tremblay échangeait depuis plusieurs années sur des réseaux sociaux des commentaires et des « j’aime » sur des sujets d’ordre privé avec Mme Sabbagh. « Le cumul de réactions au sujet d’événements de la vie privée de Mme Sabbagh publiées sur ses réseaux sociaux était suffisant pour placer la journaliste en apparence de conflit d’intérêts alors qu’elle interviewait Mme Sabbagh pour son enquête » ont statué à l’unanimité les membres du Conseil.
Le Conseil rejette les cinq autres griefs d’informations incomplètes ainsi que les griefs d’information inexacte et de partialité.
D2022-12-228 : Christian Caisse c. TVA Nouvelles
Le Conseil de presse rejette la plainte de Christian Caisse au sujet de l’article « “C’est bien triste” : la position de Carey Price envenime le débat, selon certains », publié sur le site Internet de TVA Nouvelles le 4 décembre 2022, relativement à un grief d’information inexacte. Dans l’article en cause, Nathalie Provost, porte-parole du groupe des étudiants et diplômés de Polytechnique pour le contrôle des armes à feu PolySeSouvient, déplorait la sortie publique du célèbre gardien de but des Canadiens de Montréal, Carey Price, qui avait dénoncé sur le réseau Instagram le projet de loi C-21 du gouvernement fédéral visant à restreindre l’accès à certains types d’armes à feu. Le plaignant reprochait à Mme Provost d’avoir transmis une information inexacte en affirmant que certaines personnes utilisaient un fusil semi-automatique AR-15 pour aller à la chasse, alors qu’il s’agit d’une arme à feu de type militaire prohibée au Canada. Bien que M. Caisse ait rappelé avec raison que l’AR-15 est une arme prohibée, il a interprété les propos de Mme Provost. En effet, jamais Mme Provost n’a déclaré que des chasseurs ont déjà eu – ou ont toujours – le droit d’utiliser l’AR-15. Elle rapportait plutôt les arguments de certains adeptes des armes à feu lorsqu’elle a soutenu : « Certains disent “mais non, mais moi je vais à la chasse avec ça”, par exemple le AR-15”. » C’est pourquoi le grief d’information inexacte a été rejeté.